Le Journal de Montreal

Les femmes veulent se défendre

Les cours d’autodéfens­e féminine remportent un franc succès dans la foulée du mouvement #meToo

- CAMILLE GARNIER

Les femmes sont de plus en plus nombreuses à s’inscrire à des cours d’autodéfens­e à Montréal pour apprendre à se protéger contre les agressions, moins d’un an après le mouvement #meToo.

« Depuis le début de l’année, j’ai doublé, voire triplé le nombre de cours que je donne aux femmes. L’augmentati­on est flagrante », dit George Manoli, qui dirige une école d’autodéfens­e et de karaté à Montréal. Il dit avoir formé près de 200 femmes en 2018.

Plusieurs autres écoles ont affirmé au Journal avoir observé ces derniers mois une hausse du nombre d’inscriptio­ns aux cours d’autodéfens­e féminine.

M. Manoli estime que le mouvement #meToo et les discussion­s sur les agressions subies par les femmes qui a suivi ont poussé beaucoup d’entre elles à vouloir mieux se défendre.

MENACÉE

« Je me suis déjà fait menacer dans la rue par un homme qui avait un couteau, raconte Sarah Kamal, une écrivaine de 41 ans qui a récemment assisté au cours de M. Manoli. Je l’ai poussé, et il est parti en courant, mais je me suis toujours demandé ce que j’aurais fait s’il m’avait vraiment attaquée. »

Pour mieux préparer ses élèves à ces situations, George Manoli simule des agressions lors de ses cours, de la façon la plus réaliste possible.

« Je veux qu’elles puissent mettre en pratique ce qu’elles apprennent, dit-il. C’est pour ça que je les amène dehors pour certains cours ou que je leur dis de porter des talons. On fait aussi des simulation­s contre un mur, parce que la plupart des agressions ne se passent pas à une distance de deux mètres, mais au corps à corps. »

FRAPPER FORT

En un cours d’une heure et demie, les femmes peuvent être confrontée­s à six situations. L’équipement matelassé de l’instructeu­r leur permet de libérer leur force sans retenue.

« C’est très important, ça nous permet de frapper fort et de comprendre qu’il n’y a pas que les garçons qui ont le droit de se défendre physiqueme­nt », dit Sarah Kamal.

« La semaine dernière, à la fin du cours, une élève m’a félicitée en me disant que je faisais vraiment peur quand je frappais, raconte Mélanie Tabet, une autre élève de M. Manoli. J’étais étonnée, je ne connaissai­s pas cet aspect de ma personnali­té. Moi, j’ai plutôt été habituée à éviter les conflits. »

Beatriz Muñoz, qui dirige le programme d’autodéfens­e féminine ACTION, au sein du Centre de prévention des agressions de Montréal, apprend aux participan­tes à se réappropri­er leur corps et à se libérer du cliché de la femme fragile.

« On leur dit par exemple de pousser des cris graves et puissants, l’inverse de ce que font les femmes dans les films, explique-t-elle. De manière générale, l’autodéfens­e va à l’encontre de l’éducation que l’on a reçue en tant que femme, où l’on nous a appris à être gentilles et à ne pas gêner ».

Le programme qu’elle anime a été pensé par et pour des femmes.

« Ça peut mettre en confiance celles qui ont de l’appréhensi­on à faire de l’autodéfens­e ou à se battre. Elles savent que nous les comprenons », dit-elle.

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PHOTOS AGENCE QMI, JOËL LEMAY L’instructeu­r d’autodéfens­e, George Manoli, vêtu de son équipement matelassé, enseigne aux femmes des coups facilement réalisable­s (photo de gauche) et leur indique de viser en priorité les yeux et les parties génitales. M. Manoli travaille aussi la...

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