Une quête familiale pour retrouver son grand-père
L’homme a été emporté dans le dernier convoi nazi vers les camps de la mort
Une famille de la Rive-Sud a passé plus de 60 ans à élucider la disparition de son grand-père transporté dans le dernier convoi vers les camps de concentration nazis en partance de la France.
« C’est une mort sans corps. On ne peut pas vraiment faire notre deuil. Encore aujourd’hui, il est encore très présent », dit Catherine Kozminski, une enseignante en littérature de Saint-Lambert.
Son grand-père, Ignace, un juif français de descendance polonaise, a été emporté dans le dernier convoi nazi vers les camps de concentration le 15 août 1944, quelques jours avant la libération de Paris.
Pendant 60 ans, le destin de l’homme, qui était dans la Résistance, est demeuré mystérieux, surtout pour son fils Jean-Paul, arrivé au Québec dans les années 1960.
« Je l’ai toujours vu chercher son père. Il espérait tellement qu’il soit encore vivant », raconte-t-elle.
Le seul indice qu’ils avaient était un bout de papier griffonné à la hâte par Ignace Kozminski.
« Suis parti pour destination inconnue. Arrêté à Jargeau. Prévenir ma femme. »
En 2005, son frère Alexandre a trouvé la clé de l’énigme dans les registres du camp de Bunchenwald lors d’un voyage en Allemagne.
Ignace, prisonnier numéro 77404, y est mort à 26 ans, le 25 février 1945, moins de deux mois avant la libération du camp par les Alliés.
UN LIVRE POUR LA MÉMOIRE
« Mon frère a rapporté un caillou du cantonnement au Québec pour qu’il serve de pierre tombale », relate l’auteure.
C’est aussi lui qui a annoncé la nouvelle à sa grand-mère, remariée et restée en France après la guerre.
Par devoir de mémoire, Catherine Kozminski a décidé de raconter l’histoire de son grand-père dans un livre publié récemment, intitulé Prisonniers du dernier convoi.
« Les prisonniers, ce sont les descendants. Je ne peux pas imaginer ce que mon père a vécu en grandissant orphelin, confie-t-elle. On ne parle jamais de l’impact de l’Holocauste sur les descendants. »
Toutefois, pour pallier les zones d’ombres dans la vie d’Ignace Kozminski, elle a choisi de romancer une partie de son histoire. Elle s’est inspirée de ses recherches historiques sur le sujet pour représenter le plus fidèlement possible la vie dans les camps.
« Il y a une énigme autour de sa vie, parce que, quelque part, on ne veut peutêtre pas tout savoir », affirme l’auteure de 40 ans.
Finalement, les tourments de son père, Jean-Paul, qui a écrit le mot de la fin de son livre, sont au coeur de la réflexion de Mme Kozminski sur les horreurs de l’Holocauste.
« Si on avait sauvé Ignace, qui sait ce qui se serait passé ? se questionne-t-elle. J’aurais aimé que mon grand-père survive, mais mon père n’aurait peut-être jamais eu à quitter la France… et je ne serais pas ici. »