Un système bancaire gratuit, je m’excuse, ça n’existera pas » – LOUIS VACHON, PDG DE LA BANQUE NATIONALE
Il estime que les fintechs doivent plutôt travailler en symbiose avec les banques
Le PDG de la Banque Nationale Louis Vachon est convaincu que les banques ne vont pas disparaître au profit des entreprises technos de la finance qui tentent de les détrôner avec leurs services quasi gratuits.
« Si leur modèle d’affaires c’est de remplacer les banques, bonne chance, c’est tout ce que je peux leur souhaiter parce que, nous, on ne se tassera pas », partage en entrevue au Journal le PDG de la Banque Nationale Louis Vachon. Pour le prouver, le dirigeant donne l’exemple de la techno californienne Lending Club qui est allée chercher beaucoup de prêts grâce à sa « très belle » plateforme, mais qui n’a pas été capable de les financer. Résultat, la banque montréalaise a volé au secours de l’entreprise de San Francisco en pleine crise de liquidités en achetant 1,3 milliard $ de ses prêts. « Est-ce qu’on a tiré un peu avantage de leur situation en termes de finance ? Oui, parce que dans le bancaire, il n’y a pas juste la technologie, la gestion des risques est extrêmement importante », dit le chef de l’institution de plus 250 milliards $ d’actifs. Pour l’instant, les fintechs ne sont pas actives dans les marchés des capitaux (prêts aux gouvernements et aux grandes entreprises), mais sont plus dans le prêt des particuliers et dans le système de paiement qui ne représente que 15 % des revenus de la Banque Nationale, ajoute-t-il.
« Au-delà du bruit, combien de fintechs font beaucoup d’argent au Canada ? Qui ont des revenus importants ? », s’interroge à voix haute Louis Vachon.
« PAS TRÈS BONS EN FINANCE »
« Dans fintech, il y a le mot “fin” qui veut dire finance, les gens de fintech il y en a beaucoup qui sont bons en technologie, mais pas très bons en finance », renchérit Louis Vachon pour enfoncer le clou.
Cybersécurité déficiente, blanchiment d’argent, enjeux de réglementations… Le numéro un de l’institution québécoise trouve que les fintechs ont encore bien du chemin à faire avant d’espérer rattraper les grandes banques.
À l’ère où une brèche de sécurité peut être fatale, Louis Vachon prend ses gardes. Il ne veut surtout pas qu’une jeune PME techno greffée à son réseau informatique devienne le maillon faible de son système de protection.
SÉCURITÉ DÉFICIENTE
« Une des grandes faiblesses, pour nous, de travailler avec les fintechs, c’est que dans de nombreux cas elles n’ont pas beaucoup de rigueur au niveau de la cybersécurité », insiste M. Vachon.
Dans certains cas, son équipe de sécurité a réussi à pénétrer dans leur système souche en moins d’une demiheure, ce qui n’a rien de rassurant, note-t-il.
M. Vachon est tout de même persuadé que certaines jeunes entreprises tireront leur épingle du jeu. Il garde donc l’oeil ouvert.
« Il y a de la caricature, c’est gonflé. Cela dit, le phénomène est réel, il y a des compagnies là-dedans qui vont vraiment réussir », conclut celui qui a injecté une trentaine de millions $ dans huit d’entre elles ces derniers mois.