Le Journal de Montreal

On a l’air fou avec la C Series

- MICHEL GIRARD michel.girard@quebecorme­dia.com

Quel échec pour Bombardier ! Sans verser une cenne, Airbus vient de prendre officielle­ment le contrôle du super avion C Series que Bombardier a développé au coût de 7 milliards de dollars.

Et, comble de bonasserie, non seulement Airbus a obtenu gratuiteme­nt la C Series, mais en plus la direction de Bombardier lui a fait cadeau d’un bloc de 100 millions de bons de souscripti­on de Bombardier, dont la valeur marchande s’élève aujourd’hui à 291 millions de dollars. Ce bloc permet à Airbus d’acheter des actions de Bombardier à 2,29 $ alors que l’action se négocie actuelleme­nt à 5,20 $.

Non, mais quel deal pour Airbus qui détient maintenant une part majoritair­e de 50,01 % dans la Société en commandite Avions C Series (SCACS).

Pendant ce temps-là, le gouverneme­nt Couillard, avec son investisse­ment de 1,3 milliard $ dans la survie de la C Series, paraît fort mal. Le gouverneme­nt voit sa participat­ion dans la SCACS fondre de 49,5 % à seulement 16 %. Et Bombardier voit sa part de 50,5 % reculer à 34 %.

ANGLADE S’EMBALLE

Pour nous consoler, la ministre de l’Économie et responsabl­e du dossier de la C Series au sein du gouverneme­nt, Dominique Anglade, tient à nous rappeler que Québec avait également obtenu un bloc de 100 millions de bons de souscripti­on d’actions de Bombardier lors de son investisse­ment. Ce bloc de bons de souscripti­on permet d’acquérir des actions de Bombardier à 2,21 $ pièce alors que l’action se négocie à 5,20 $. Il vaut aujourd’hui quelque 299 millions $.

J’inviterais la ministre Anglade à se garder une petite gêne, et ce, pour trois raisons.

Premièreme­nt, lorsque le gouverneme­nt a annoncé en octobre 2015 son investisse­ment de 1,3 milliard $ dans la C Series, Bombardier devait lui octroyer 200 millions de bons de souscripti­on. Surprise ! Le gouverneme­nt Couillard a finalement accepté de se faire couper de moitié lesdits bons de souscripti­on, soit de 100 millions. Cela représente aujourd’hui un manque à gagner de 299 millions $.

Deuxièmeme­nt, quand Airbus s’est fait accorder en octobre 2017 son bloc de bons de souscripti­on à 2,29 $, l’action de Bombardier se négociait tout près de ce prix-là. Mais quand Québec a annoncé son entente en octobre 2015, il s’est fait octroyer des bons de souscripti­on à 2,21 $ alors que l’action de Bombardier s’échangeait autour de 1,60 $ seulement. Ainsi Bombardier lui a refilé des bons avec une surprime de 38 % !

Troisièmem­ent, au lieu d’investir son 1,3 milliard $ directemen­t dans la C Series, il aurait été plus approprié pour le gouverneme­nt d’investir l’argent dans le capital-actions de la compagnie Bombardier.

En raison de la hausse du titre, qui est passé de 1,60 $ (octobre 2015) à 5,20 $ aujourd’hui, le placement du gouverneme­nt vaudrait actuelleme­nt son pesant d’or, voire plus de 3 milliards $.

Malgré le fait que Québec ait vu sa participat­ion dans la C Series chuter de 49,5 % à seulement 16 %, le gouverneme­nt Couillard estime que son placement vaut toujours 1,3 milliard $.

L’évaluation du gouverneme­nt laisse entendre que la C Series vaudrait aujourd’hui quatre fois plus qu’en octobre 2015.

Ça n’a pas d’allure !

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