Le Journal de Montreal

Accurso à l’ombre pour 4 ans

Il a écopé hier de quatre ans de pénitencie­r pour avoir fraudé les Lavallois pendant 14 ans, mais va faire appel

- JEAN-LOUIS FORTIN

Finis le yacht, la luxueuse villa au bord de l’eau et les restaurant­s chics. C’est derrière les barreaux que l’entreprene­ur déchu Tony Accurso passera les prochaines nuits, lui qui a été condamné hier à une lourde peine de quatre ans de pénitencie­r pour avoir participé au trucage des contrats publics à Laval.

Le visage fermé, l’homme de 66 ans a été placé dans un box vitré immédiatem­ent après le prononcé de sa sentence.

Il a pu échanger quelques mots avec son avocat Marc Labelle à travers un combiné téléphoniq­ue, avant d’être conduit dans le couloir des détenus par une constable du palais de justice de Laval.

Tony Accurso espérait pouvoir purger sa peine à son domaine de 2,7 millions $ à Deux-Montagnes, dans les Laurentide­s, mais le juge James Brunton, de la Cour supérieure, a d’emblée rejeté cette possibilit­é.

Il a insisté sur la gravité et la fréquence des crimes commis par l’entreprene­ur, c’est-à-dire sa participat­ion à un stratagème de collusion pendant 14 ans, en retour du versement de pots-de-vin correspond­ant à 2 % de la valeur des contrats qu’il obtenait.

« C’est l’appât du gain qui a motivé la participat­ion de M. Accurso, et non pas une simple décision d’affaires. […] Sans son appui, le système collusionn­aire n’aurait pas pu durer », a soutenu le magistrat.

IL FAIT APPEL

Tony Accurso restera détenu jusqu’à au moins mardi prochain, date à laquelle l’avis d’appel de sa condamnati­on déposé hier sera entendu.

« Vous l’avez vu, il n’a pas été surpris [d’être incarcéré] », a brièvement commenté Me Labelle. Selon lui, le fait que son client ait opté pour un procès au lieu de plaider coupable a considérab­lement alourdi la sentence.

D’autres entreprene­urs qui participai­ent au stratagème de corruption et de collusion dirigé par l’ancien maire Gilles Vaillancou­rt, et qui ont préféré s’entendre avec la Couronne l’an dernier, ont plutôt écopé d’au maximum deux ans de prison.

« SUCCÈS SUR TOUTE LA LIGNE »

Par contre, Accurso n’aura pas à payer l’amende de 1,6 M$ que souhaitait lui imposer la Couronne. Il fait cependant toujours face à une poursuite civile de presque 30 M$ intentée par la Ville de Laval.

Me Philippe-Pierre Langevin, un des procureurs de la Couronne, s’est pour sa part déclaré « satisfait » de la peine imposée.

Il a estimé que le projet d’enquête Honorer, qui a permis d’arrêter 37 personnes en 2013, dont l’ex-maire Vaillancou­rt, était « un succès sur toute la ligne » puisque 28 individus ont finalement été trouvés coupables.

Vaillancou­rt, qui dirigeait le système criminel, a été le plus sévèrement puni. Il a écopé d’un peu moins de six ans de prison en décembre 2016, mais a recouvré sa liberté moins d’un an plus tard en raison de sa bonne conduite derrière les barreaux.

FAILLITE

Accurso devrait lui aussi être admissible à une libération conditionn­elle au sixième de sa peine.

L’homme d’affaires serait aujourd’hui au bord de la faillite, mais à son apogée, au milieu des années 2000, ses entreprise­s comptaient 4500 employés et un chiffre d’affaires annuel d’un milliard de dollars.

Il possédait un yacht de 120 pieds valant 8,5 M$, le Touch, sur lequel il amenait des politicien­s et des dirigeants de la FTQ-Constructi­on, et dont il s’est départi en 2014.

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PHOTO MARTIN ALARIE Tony Accurso, qu’on voit ici à son arrivée hier au palais de justice de Laval, a été incarcéré immédiatem­ent après le prononcé de sa peine d’emprisonne­ment.

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