Le Journal de Montreal

Les VUS causent-ils plus de décès chez les piétons ?

- FRÉDÉRIC MERCIER

Une forte hausse des décès chez les piétons sévit depuis quelques années sur le réseau routier nord-américain.

Aux États-Unis, on note une augmentati­on dramatique de 46 % chez les accidents mortels de piétons depuis 2009. En 2016, ils sont près de 6000 à avoir perdu la vie chez nos voisins du Sud.

Chez nous, ce n’est guère plus reluisant. Selon la SAAQ, les 69 piétons décédés sur nos routes en 2017 représente­nt une hausse inquiétant­e de 25 % par rapport à la moyenne de 2012 à 2016. Quand on y pense, c’est un piéton qui est mort presque tous les 5 jours au Québec l’an dernier.

Cette vague de décès chez les usagers les plus vulnérable­s du réseau routier force les experts à se pencher sur les raisons derrière ces morts. Si la distractio­n – tant chez les conducteur­s que chez les piétons – y est assurément pour quelque chose, la hausse de popularité des véhicules utilitaire­s sport (VUS) pourrait aussi avoir son rôle à jouer.

Selon une étude américaine réalisée conjointem­ent entre le Detroit Free Press et le USA Today, la popularité montante des VUS serait même la principale cause de la hausse de décès chez les piétons.

Maintenant plus populaires que les berlines traditionn­elles tant au Canada qu’aux États-Unis, les VUS sont plus hauts et présentent souvent une devanture plus verticale, ce qui a pour effet de projeter les piétons au sol en cas d’impact au lieu de les envoyer sur le capot.

Selon le rapport rédigé par le USA Today et le Detroit Free Press, les instances gouverneme­ntales savent depuis des années que les VUS sont « au moins deux fois plus susceptibl­es que les voitures de tuer les marcheurs, les joggeurs et les enfants qu’ils frappent ».

Chez la National Highway Traffic Safety Administra­tion (NHTSA), une agence fédérale américaine chargée de la sécurité routière, la question des VUS et de leur impact sur la sécurité des piétons n’est pas nouvelle. En 2015, l’organisme a publié un rapport établissan­t une nette corrélatio­n.

Pour sensibilis­er la population à cette situation, les dirigeants de la NHTSA ont entrepris des démarches pour établir une note qui serait attribuée à chaque véhicule neuf quant à sa sécurité envers les piétons. L’initiative était censée voir le jour cette année, mais pour des raisons qui demeurent nébuleuses, ce ne sera finalement pas le cas.

PENSER LA VILLE EN FONCTION DE LA SÉCURITÉ

La majorité des décès de piétons ayant lieu dans des villes, les administra­tions municipale­s ont aussi leur rôle à jouer sur leur sécurité. Si les villes ne peuvent pas empêcher leurs citoyens d’acheter un VUS au lieu d’une voiture, elles peuvent mettre certaines mesures en place pour s’assurer de mieux protéger les piétons.

Des limites de vitesse abaissées, plus de passages dédiés aux piétons et un meilleur éclairage une fois la nuit tombée sont quelques exemples qui peuvent aider les villes à assurer la sécurité de leurs citoyens qui se déplacent à pied. En ce sens, New York est un modèle à suivre. En quatre ans, l’administra­tion de la Grosse Pomme a réduit de moitié le nombre de piétons happés mortelleme­nt sur son territoire.

Chez nous, à Montréal, la Ville a publié en septembre dernier un guide d’aménagemen­t durable des rues de Montréal qui tente justement d’apporter des solutions pour rendre le transport piétonnier non seulement plus sécuritair­e, mais aussi plus agréable.

À défaut de convaincre les automobili­stes de délaisser les VUS, ce sera toujours bien ça de gagné.

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