Le Journal de Montreal

Ça sent l’herbe

- CLAUDE VILLENEUVE claude.villeneuve@quebecorme­dia.com

À Québec, c’est le Festival d’été. Je ne sais pas comment ça se passe ailleurs, mais ici, quand c’est le FEQ, ça change l’ambiance partout en ville.

Et sur les sites des spectacles, ça sent l’herbe. Un peu le haschisch, parfois, me dit-on. Au Festival de jazz, est-ce que ça sent aussi ?

Il faudrait peut-être. Ça aiderait les gens à se calmer...

Bref, j’ai ma dose quotidienn­e de fumée secondaire ces temps-ci. Et je ne peux pas dire que ça m’affecte, mis à part que ce n’est pas un parfum que je prise particuliè­rement.

Ce n’était pas différent avant, remarquez. Tenez, samedi, c’était la traditionn­elle soirée hip-hop, au FEQ. Les amis de Marie-Jeanne n’ont pas tenté de s’y faire discrets, comme chaque année.

Mais voilà, le cannabis sera légalisé en octobre et on se demande si, d’une part, les autorités ont déjà commencé à lever le pied sur la prohibitio­n et, d’autre part, si la drogue se fera plus présente, dans un tel contexte.

TOLÉRANCE

L’autre soir, j’ai été témoin d’une scène cocasse en sortant d’un spectacle. Alors que quatre policiers au regard morne mais bienveilla­nt surveillai­ent les badauds qui rentraient chez eux, un jeune homme s’est approché et leur a demandé s’ils allaient exercer une tolérance s’il allumait un joint. Vu le contexte...

Les policiers ont été catégoriqu­es. Le cannabis est toujours illégal et il s’expose à des conséquenc­es pénales s’il choisit de consommer.

Les policiers ont quand même été chouettes. Le jeune venait d’avouer tacitement qu’il avait de la drogue sur lui. Devant des zélés — ou des gens moins désireux de ne pas compliquer leur soirée de travail —, il aurait pu être dans le trouble.

Ça n’a pas empêché notre ami d’argumenter longuement avec les policiers, inflexible­s. Comme s’il croyait vraiment que l’un d’entre eux finirait par déclarer, de guerre lasse : « Envoye, fume-le ton joint ! Pis tu m’en donneras une puff, un coup parti... »

Dire que le jeune homme n’avait qu’à tourner le coin ou à retourner chez lui pour allumer sans être inquiété, ce qu’il fit probableme­nt. Parce qu’il faut bien l’admettre, la situation actuelle, d’avant la légalisati­on, c’est pas mal ça.

ILLUSION

Je remarque depuis un bout que, sur le web, dès qu’il est question d’un fait divers, d’un accident, d’une altercatio­n ou d’un événement violent, il se trouve quelqu’un pour commenter : « Attendez bien, quand le pot sera légal, ce sera encore pire ! »

Il y a des gens qui pensent vraiment que la légalisati­on du cannabis va changer le climat social perceptibl­ement.

Je suis désolé de vous décevoir, mais il faudrait vous sensibilis­er au fait que, dans l’état actuel des choses, quiconque veut se procurer de l’herbe y parvient. Pardon de détruire vos illusions.

Restreindr­e l’accès à la substance, c’est justement l’une des raisons évoquées par le gouverneme­nt fédéral, pour décriminal­iser. On verra si ça marche ou pas, mais ce qui est certain, c’est qu’il y a déjà beaucoup de monde qui fume du pot. Il est difficile de deviner qui pourrait encore décider de s’y mettre une fois que la légalisati­on sera chose faite.

Il y a des limites à l’élasticité de la demande.

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Dans l’état actuel des choses, quiconque veut se procurer de l’herbe y parvient.
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