LE SOMMET DE LA GASPÉSIE RASÉ
Plusieurs dont caribous région, les sont derniers de espèces, la en voie de disparaître alors que les machines industrielles montent de plus en plus haut pour raser les forêts des monts Chic-Chocs.
Les forestiers ont tellement coupé en 30 ans dans la réserve faunique de Matane qu’ils ont atteint les sommets escarpés des Chic-Chocs où se réfugient les derniers caribous de Gaspésie, d’après des images satellites compilées par Le Journal.
« Si on continue comme ça, d’ici une vingtaine d’années, il n’y aura plus de caribous en Gaspésie », prévient le biologiste Martin-Hugues St-Laurent, directeur de recherche en écologie animale à l’Université du Québec à Rimouski (UQAR).
Le Journal a compilé des images satellites prises au-dessus de la réserve faunique de Matane entre 1984 et 2016. D’une année à l’autre, on constate la progression des coupes et des chemins forestiers de plus en plus alarmante dans le territoire, vers le nord et les sommets.
« C’est choquant », réagit Alain Branchaud de la Société pour la nature et les parcs (SNAP).
Le porte-parole du Comité de sauvegarde des Chic-Chocs, Louis Fradette, parcourt ces montagnes depuis 40 ans. Au fil des ans, il a vu les machines escalader les sommets de plus en plus haut, parfois au-delà de 600 mètres d’altitude.
« Ils vont vers les sommets et dans les côtes, dans des milieux très fragiles où la repousse est limitée comparée aux basses altitudes et à la vallée. Il y a un secteur qui a été coupé en 2007 où rien n’a repoussé encore », déplore-t-il.
AIRE PROTÉGÉE ÉTUDIÉE
Pourtant, un projet d’aire protégée est à l’étude dans le secteur depuis 2013. Les coupes y sont, depuis, interdites sur 184 km2 en attendant la fin de l’analyse confiée au ministère de l’Environnement, selon Nicolas Bégin, porte-parole du ministère des Forêts.
Mais l’activité industrielle se poursuit tout autour des frontières de la zone sous moratoire. Celle-ci représente ainsi un îlot de forêt isolé qui ne permet pas le rétablissement du caribou, puisqu’il a besoin de grands espaces non perturbés.
Pour le Comité de protection des Chic-Chocs, afin d’être efficace pour protéger la biodiversité, la zone protégée devrait s’étendre sur 400 km2, soit plus du double de ce qu’a retenu le ministère.
FORÊT, GAZ, PÉTROLE ET MINES
L’équipe scientifique du professeur St-Laurent recommande pour sa part de réduire les coupes forestières de 15 à 20 % sur 90 km autour du parc national de la Gaspésie.
Mais le porte-parole du ministère de l’Environnement, Clément Falardeau, souligne qu’outre les « contraintes forestières », le territoire compte des droits miniers et des permis d’exploration pétrolière et gazière. Autant d’éléments qui compliquent la création d’une aire protégée dans la zone.
« L’absence de cohésion entre les ministères responsables du territoire est tout simplement aberrante », gronde M. Branchaud.