Le Journal de Montreal

Marquette : analyses coûts/bénéfices

- MARIO DUMONT

En affaires, en politique comme dans sa propre maison, si l’on veut qu’un projet se réalise, il y aura un coût. Or, assumer un coût est une chose normale et heureuse lorsqu’on a confiance de récolter un bénéfice plus grand. On célèbre alors une opération rentable !

J’ai essayé d’appliquer cette grille d’analyse « coûts vs bénéfices » à l’opération menée cette semaine par l’équipe de Philippe Couillard dans la circonscri­ption de Marquette. Je dois avouer que j’ai beaucoup de misère à saisir comment les stratèges libéraux ont fait leur calcul.

François Ouimet est un bon gars. Je l’apprécie bien, mais son départ ne représente pas un coût élevé dans l’opinion publique. Il est resté peu connu, il n’a jamais marqué l’imaginaire et les Québécois hors de sa circonscri­ption vont l’avoir oublié dans 48 heures. C’est ingrat, mais c’est la réalité.

Le coût pour Philippe Couillard est donc ailleurs. D’abord dans l’esprit d’équipe. Voir celui qui présente 24 années de loyaux services se faire jeter aux poubelles aussi brutalemen­t, avec un préavis de moins de 24 heures, envoie un bien drôle de message aux autres membres de l’équipe.

Lorsqu’on dira au caucus qu’il faut se serrer les coudes et démontrer une loyauté infinie envers le chef, certains laisseront flotter dans leur pensée des questionne­ments sur la réciprocit­é de cette loyauté. Et certains autres se diront carrément que, dans ce parti, il faut seulement sauver sa propre peau : tant pis pour la solidarité avec les collègues.

LA PAROLE !

Pour ouvrir un siège à l’exhockeyeu­r Enrico Ciccone, Philippe Couillard paye un prix très élevé.

Mais le coût le plus énorme pour Philippe Couillard consiste à passer devant tout le Québec pour un homme dont la parole ne vaut rien. Nous n’étions pas présents dans cette pièce, nous ne pourrons jamais vérifier. Mais ce qu’a raconté François Ouimet n’est pas chic. Un chef qui serre une poignée de main, les yeux dans les yeux, et s’engage à ne pas lui jouer dans le dos. Et qui manque à sa parole ensuite…

Dans une campagne électorale, les chefs passent leur temps à s’engager solennelle­ment, à donner leur parole. Imaginez dans un débat de cette campagne si monsieur Couillard donne sa parole aux Québécois la main sur le coeur. Ses adversaire­s vont-ils s’amuser à lancer des formules assassines du genre « Que vaut la parole de Philippe Couillard ? Allez demander à François Ouimet ! »

POUR CICCO !

Le coût est considérab­le. Et le bénéfice maintenant. Les libéraux libèrent un comté pour l’ex-hockeyeur Enrico Ciccone. « Cicco », comme il se fait appeler dans le monde du sport, a des qualités personnell­es et deviendra peut-être un politicien habile. Mais aujourd’hui, il n’est ni une star de la politique, ni ministrabl­e à court terme.

De plus, il avait annoncé son retrait de son emploi à la radio depuis trois semaines pour se présenter. Comment expliquer qu’on n’ait pas pu lui organiser un atterrissa­ge moins chaotique plus tôt, moins proche de l’élection ?

En résumé, on dirait bien une opération politique mal ficelée, dont les coûts apparaisse­nt bien plus grands que les bénéfices.

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François Ouimet
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mario.dumont@quebecorme­dia.com

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