Le Journal de Montreal

Quand tes qualités se transforme­nt en défauts

Les enfants des autres ne nous appartienn­ent pas

- LOUISE DESCHÂTELE­TS louise.deschatele­ts@quebecorme­dia.com

La lettre signée G.P. m’a donné envie d’expliquer à cette dame quelles sont les raisons qui font que son mari n’a toujours pas envie de prendre sa retraite à 70 ans. Et c’est la question que vous posiez Louise en fin de commentair­e qui m’a provoqué. Vous tapez dans le mille quand vous lui demandez : « Se pourrait-il que votre mari craigne de subir votre autoritari­sme au quotidien ? »

Je me suis marié à 20 ans avec une femme joyeuse, dynamique et en constante activité. Rien ne la rebutait ni ne lui faisait peur. La maison, son travail, le soin de nos enfants et les courses pour faire tourner le ménage, elle voyait à tout. Je me laissais faire comme un bébé, car le maladroit que j’étais préférait se laisser servir que de faire des gaffes et se les faire remettre sur le nez. Car oui, remettre les gaffes sur le nez du coupable, elle savait faire, jusqu’à la blessure. Mais je me disais que c’était si peu comme défaut, comparé à toutes ses qualités !

Les années ont passé, les enfants sont partis et la vieillesse nous a gagnés. Quand est venu le temps de la retraite, je n’avais pas envie de la prendre pour me retrouver face à face avec une femme qui était devenue invivable, tant le goût de tout régenter avait fait d’elle une « gèremène » dans le sens le plus strict du terme.

Je m’y suis résigné à 72 ans sur les conseils de mon médecin. Vous allez certaineme­nt me trouver ignoble Louise, mais heureuseme­nt que ma « gère-mène » n’a survécu que quatre ans avant de mourir d’un cancer, car je n’en pouvais plus de son attitude à mon endroit. « Ma chère G.P., je vous recommande­rais un examen de conscience pour voir si Louise n’aurait pas vu juste avec sa question. De grâce, ne faite pas comme ma femme, dont les plus belles qualités se sont transformé­es en défauts, ce qui m’a quasiment fait souhaiter son grand départ. »

Anonyme

Merci de ce généreux partage. Espérons qu’il fasse son chemin pour réveiller cette personne.

De la même manière que vous le racontait un homme ce matin, il a fallu que je donne son 4 % à un copain que je m’étais fait après le divorce d’avec mon mari. En venant vivre avec moi et mes deux enfants, il avait cru que ces derniers devenaient automatiqu­ement sous sa gouverne et je ne l’ai pas pris.

Je comprends qu’un nouveau beau-père veuille faire sa place dans une famille. Mais cette place ne sera jamais la même dans une famille où les enfants ont déjà un père qui s’occupe d’eux. Je trouve bizarre que certains hommes se sentant investis d’une mission paternelle à laquelle ils n’ont pas droit dans les faits, fassent passer ce désir, en avant de l’amour qu’ils sont sensés porter à la mère des enfants en question.

Je l’avais prévenu de garder ses distances et de ne pas tenter de prendre le pas sur l’autorité du père de mes enfants, mais il ne m’a pas cru assez solide pour lui tenir tête dans ses prétention­s. Je n’ai eu d’autre choix que de l’évincer. Et tout comme le monsieur qui vous a écrit, il s’est senti frustré que je ne lui accorde pas ce qu’il appelait « sa juste place dans la famille. » Désormais seule, mais en accord avec moi-même

Ce que vous décrivez n’est pas rare, vu le nombre de familles recomposée­s au Québec. Mais à la décharge de ces hommes, on doit admettre qu’il n’y a rien de plus difficile que de concilier une partie d’une famille nucléaire avec une portion rapportée, qu’elle soit homme ou femme, pour tendre vers l’équilibre. Ça fait partie des nombreux défis qu’ont à relever les familles d’aujourd’hui.

 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from Canada