Le Journal de Montreal

S’endetter pour se faire soigner

Plusieurs Québécois en région sont comme les Leblanc-McNeil : même s’ils paient les mêmes impôts que les autres, leurs soins de santé leur coûtent cher.

- Avec la collaborat­ion d’Amélie St-Yves

Les Québécois qui habitent en régions éloignées doivent parfois parcourir des centaines de kilomètres et dépenser des milliers de dollars pour être soignés, un fardeau que les gens des grands centres n’ont pas à assumer.

Des malades de régions éloignées se sentent inégaux face à la maladie par rapport aux citoyens des grands centres, même s’ils paient les mêmes taxes et impôts. Certains doivent déménager ou s’endetter pour être soignés.

Ils comprennen­t que tous les services spécialisé­s ne peuvent pas être offerts dans toutes les régions.

Mais plusieurs trouvent insultant de recevoir 13 cents du kilomètre de la part du ministère de la Santé, alors que Revenu Québec évalue qu’il en coûtait 50,5 cents du kilomètre (en 2017) aux malades qui n’ont pas accès à des soins médicaux spécialisé­s dans leurs régions. Un non-sens, selon eux.

« Sans les collectes de fonds organisées par notre entourage, on serait difficilem­ent passés au travers. On [les gens des régions] paie le même montant en impôts. Par contre, on paie deux fois l’accès aux services pour lesquels on cotise aux mêmes taux que les gens des grands centres », dit Véronique SaintPierr­e, dont le fils aujourd’hui décédé du cancer a dû voyager de la Gaspésie vers Québec pour subir des traitement­s.

DES SOLUTIONS

Des intervenan­ts et patients rencontrés par Le Journal au cours des derniers mois estiment que les solutions sont pourtant simples et peu dispendieu­ses comparativ­ement au budget total du ministère de la Santé pour 2018-2019, soit 38,5 milliards $. En voici quelques-unes. √ Un meilleur service de transport aérien √ Hausser le taux de 13 cents du

kilomètre √ Se servir davantage de la

télémédeci­ne √ Améliorer l’accès au Manoir Ronald McDonald Depuis que la réforme du ministre Gaétan Barrette a fait passer le nombre d’établissem­ents de santé de 182 à 32 en 2015, des régions ont l’impression d’avoir perdu le contrôle des décisions qui les concernent.

La préfète de la MRC de Témiscamin­gue, Claire Bolduc, se bat auprès de décideurs qui se trouvent à Rouyn-Noranda à plus de 110 km pour obtenir des services de santé.

« La campagne électorale est une occasion en or pour rappeler à tous les partis politiques que la gouvernanc­e locale est garante de résultats. La très grande concentrat­ion de toutes les décisions en soins de santé au Québec est la pire décision qui a été prise pour tout le système de santé du Québec », dit Mme Bolduc.

TECHNOLOGI­E

« Alors qu’on prétend centralise­r pour faire des économies d’échelle, on fait du gaspillage parce qu’on n’est plus capable d’allouer adéquateme­nt les ressources », estime Guillaume Hébert, chercheur à l’Institut de recherche et d’informatio­ns socioécono­miques.

Le recours à la technologi­e est une solution qui permettrai­t d’éviter des déplacemen­ts de centaines de kilomètres pour parfois un rendez-vous de seulement 15 minutes.

Mais l’Associatio­n médicale canadienne croit que le Canada a pris du retard par rapport aux pays du G7.

« Notre système de santé tarde à s’adapter à la venue de ces nouvelles technologi­es. Cela explique peut-être que nous sommes devenus avec le temps moins performant­s », dit le docteur Laurent Marcoux, président de l’Associatio­n médicale canadienne.

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PHOTO COURTOISIE Félix L’Abbé-Deslaurier­s, aujourd’hui décédé, et sa mère Véronique SaintPierr­e lors du festival OhMyFest à Montréal, en 2016.
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*Calculer pour 49,5 cents du kilomètre, soit le montant reconnu par Revenu Québec en 2016.
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PHOTO COLLABORAT­ION SPÉCIALE, STÉPHANIE GENDRON À l’hôpital de La Pocatière (photo principale), dans le Bas-SaintLaure­nt, des citoyens se sont mobilisés pour ne pas perdre leurs services de santé.
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CLAIRE BOLDUC Préfète
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GUILLAUME HÉBERT Chercheur

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