Le Journal de Montreal

Disparaîtr­e ?

- RICHARD MARTINEAU richard.martineau @quebecorme­dia.com

J’avais un ami qui était super drôle, mais qui en faisait toujours trop.

Au début de la soirée, on le trouvait amusant, mais plus le temps s’écoulait, plus on avait envie qu’il parte.

François Legault me fait parfois penser à lui.

TROP C’EST COMME PAS ASSEZ

Prenez sa position sur l’immigratio­n. Quand le chef de la CAQ dit qu’il faudrait diminuer le nombre d’immigrants que nous recevons annuelleme­nt afin de mieux les intégrer, j’applaudis. Et je suis sûr que je ne suis pas le seul. Mais quand François Legault dit que nos petits-enfants ne parleront plus français si l’on continue d’accueillir des immigrants non francophon­es, je décroche.

Était-il obligé d’aller jusque là ? Il me semble que la première propositio­n se tenait toute seule, pas besoin d’en rajouter. Comme dit l’adage : « Trop, c’est comme pas assez. » On a l’impression d’entendre les paroles de

Mommy, la chanson catastroph­iste de Marc Gélinas. « Mommy, Mommy, I love you dearly Please, tell me how in French my friends used to call me ? Mommy, what happened to my name ? Oh ! Mommy, how come it’s not the same Oh ! Mommy, tell me why it’s too late, too late, much too late… »

NOTRE PIRE ENNEMI

Nous avons reçu des centaines de milliers d’immigrants au fil des ans. Des Italiens, des Polonais, des Roumains, des Chiliens, des Vietnamien­s, des Chinois. Ils ne parlaient pas un traître mot de français quand ils sont arrivés. Et nous en avons fait des Québécois francophon­es. Grâce à la loi 101.

Bon, certes, tout n’est pas parfait. On trouve encore trop d’employés unilingues anglophone­s dans certains commerces de Montréal. Et l’agaçant « Bonjour, hi » est de plus en plus utilisé. Mais de là à dire que le français va disparaîtr­e au Québec dans deux génération­s ? Woah, capitaine ! Respirons par le nez. Comme le dit souvent mon ami Jonathan Trudeau, les Québécois ne sont pas des petites choses fragiles qu’il faut protéger. On a parlé français, on parle français et on va continuer de parler français au Québec.

Il faut être vigilant, oui. Mais de là à peindre l’avenir en noir pour faire peur au monde…

La plus grande menace à la survie du français n’est pas l’immigratio­n. C’est notre propre paresse. Notre inertie, notre mollesse. Le fait qu’on écrive tout croche et qu’on parle tout croche. Ça l’a l’air. Le monde sont. Une sandwich. Bon matin. Nous sommes notre pire ennemi.

LEGAULT ET PAYETTE, MÊME COMBAT

D’ailleurs, c’est ironique que François Legault ait choisi cette semaine pour dire que les Québécois francophon­es risquent de disparaîtr­e.

« Disparaîtr­e » était justement le titre d’un documentai­re que Lise Payette et le réalisateu­r Jean-François Mercier présentaie­nt à la télé en 1989. Vous vous rappelez ? Madame Payette disait que l’immigratio­n menaçait la survie du peuple québécois. Trente ans plus tard, nous sommes toujours là. Ce qu’il faut, au Québec, ce sont des immigrants éduqués et compétents qui mettront la main à la pâte et ne vivront pas aux crochets de l’État. Ils ne parlent pas français ? On va leur apprendre. Plus facile de franciser un allophone que d’essayer d’intégrer un immigrant francophon­e qui ne veut rien savoir de nos valeurs.

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