Le charme trompeur des voitures classiques
Je plaide coupable. J’ai été envoûté, au fil des années, par une poignée de voitures qui n’étaient pas toutes neuves et même pas neuves du tout.
Je ne suis pourtant pas un nostalgique de l’automobile. Surtout pas quand il est question de conduite, de performance, de tenue de route et de freinage. Pour toutes ces choses, je préfère les voitures les plus modernes et récentes. Surtout les meilleures sportives, qui offrent le summum dans ces quatre domaines.
Bien sûr, j’ai un faible pour les voitures qui ont marqué mon enfance, comme tout le monde. Aussi pour celles qui me faisaient rêver dans les magazines, quand j’étais ado. Vous savez, ces choses imprimées, pleines de photos, qu’on trouve à pleines boîtes dans les brocantes et les ventes de garage, bien nommées, pour une fois.
J’aime les voitures qu’on dit maintenant anciennes, parfois en miniature, mais je n’ai ni le temps, ni l’espace, ni les moyens de me payer celles que je voudrais, grandeur nature. Pas tellement le goût, non plus, de me taper l’entretien, les réparations ou le toilettage en continu. Contrairement à mes collègues qui possèdent quatre, six ou huit voitures, camionnettes ou fourgonnettes à la fois. Les collections de Michel Barrette et Jay Leno ne risquent pas d’être surclassées, mais c’est quand même beaucoup. À mes yeux, du moins, et à ceux de mon portefeuille.
PLAISIRS RARES ET INTENSES
Pour en revenir aux charmeuses du début, elles m’ont fait le coup sournoisement. D’abord cette Porsche 911 RS America 1993, produite à seulement 701 exemplaires, que Bernard Lefebvre a eu le courage de me prêter pour un essai sur piste à St-Eustache, diffusé ensuite à l’émission du Guide de l’auto. Avec sa direction vive, sa tenue de route précise et les réactions instantanées de son « boxer » de 247 chevaux, c’était comme chevaucher une panthère. Rugissement inclus.
Il y eut ensuite cette diabolique 911 SC/RS que Porsche avait sortie de son musée pour le lancement californien de la 911 actuelle, le type 991. Seulement vingt de ces voitures ont été fabriquées, en 1984, pour l’homologation de la 911 au légendaire Groupe B, en rallye mondial. Avec un poids de seulement 980 kg pour ses 252 chevaux, les performances, le comportement et le son étaient stupéfiants, malgré une boîte de vitesses atroce. Au point de faire passer la pauvre 991 pour aseptisée, alors que c’est une sportive brillante.
Le troisième acte s’est joué récemment lorsque j’ai renoué avec la Mazda RX-7 FD que j’avais découverte à son lancement en 1993 et conduite maintes fois par la suite. J’ai retrouvé avec grand plaisir la puissance, la souplesse et la sonorité unique de son moteur rotatif à double turbo séquentiel. Savouré aussi sa simplicité, son agilité et son équilibre remarquables.
LA RANÇON DES SENSATIONS
En cherchant ce qui rend ces trois voitures irrésistibles, j’ai réalisé qu’il s’agit de sportives qu’on a mis un soin exceptionnel à rendre aussi légères et agiles que possible, en y sacrifiant une part variable de confort. Sans compter qu’aucune n’a le moindre accessoire ou système électronique axé sur la conduite ou la sécurité.
La transformation la plus extrême était évidemment celle de la 911 SC/RS qui, en plus de sa carrosserie ultralégère, truffée d’aluminium, n’a ni places arrière, ni chauffage, ni insonorisation. Pas étonnant qu’elle soit terriblement excitante à conduire, mais vivre avec au jour le jour ? Pas sûr du tout. Puriste ou pas.
Ce qui m’amène à penser à la voiture sport la plus populaire de toutes sur cette planète, la MX-5 Miata, dont Mazda a maintenant fabriqué plus d’un million d’exemplaires. Pour la quatrième génération, les ingénieurs ont réussi à la rendre plus agile, plus performante, plus confortable et quand même plus légère que la précédente de 100 kg.
MIRACLE ET SPLENDEURS D’ANTAN
La MX-5 ne pèse ainsi que 1058 kg, malgré une kyrielle de systèmes de conduite et de sécurité, tous les accessoires de confort souhaitables et plein de prises pour bidules numériques. Et c’est toujours une joie de la conduire, surtout avec le moteur plus puissant et le volant enfin télescopique qu’elle reçoit pour 2019. Cet exploit d’ingénierie est la preuve qu’il est possible de tout avoir aujourd’hui, presque sans compromis ou sacrifice.
Il faut donc conduire ces merveilles que sont les voitures anciennes, classiques ou pas, avec le double et le triple de prudence. D’abord parce qu’elles sont toujours précieuses, au moins pour leur propriétaire, mais aussi parce qu’elles n’offrent qu’une fraction de la protection et souvent aucun des systèmes de sécurité qu’on trouve dans les voitures récentes. Même la plus modeste des sous-compactes.
Espérons qu’il y aura toujours des circuits, des rassemblements et des rallyes pour profiter pleinement des charmes, des excentricités et des mécaniques pures de ces vénérables machines.
Il faut donc conduire ces merveilles que sont les voitures anciennes, classiques ou pas, avec le double et le triple de prudence.