Le Journal de Montreal

« Ma vie a été une partie de poker »

Alan Labrosse dit n’avoir jamais souhaité la vente de l’Autodrome St-Eustache

- Louis Butcher LButcherJD­M c louis.butcher @quebecorme­dia.com

SAINT-EUSTACHE | Au troisième étage du bâtiment principal de son complexe de sports motorisés, qu’il abandonner­a l’an prochain non sans un gros pincement au coeur, Alan Labrosse nous montre son environnem­ent de travail.

l∫ Au centre de la pièce se dresse une table de poker. Le propriétai­re de l’Autodrome Saint-Eustache explique, d’entrée de jeu, qu’il n’a jamais joué aux cartes, mais qu’il a sauté sur l’occasion de se procurer cette pièce de… mobilier qui se veut un clin d’oeil à sa carrière de pilote et d’entreprene­ur.

« Je trouvais que cette table, qui fait office de bureau, correspond­ait parfaiteme­nt à mon parcours en sports motorisés, raconte Labrosse en entrevue au Journal de Montréal. Ma vie a été une partie de poker. J’ai pris des risques autant en roulant sur les circuits qu’en organisant des courses.

Pour moi, c’était all in, avec les conséquenc­es souvent fâcheuses qui pouvaient en résulter. »

UN LEGS À SES FILS

Il y a six mois à peine, cédant à la dernière offre de la Ville de Saint-Eustache, il accepte de vendre les lieux.

Une transactio­n évaluée à 5,3 millions de dollars.

L’accord prévoit cependant que Labrosse conservera la propriété de la portion de terrain où sont installés une dizaine d’ateliers du côté nord du tracé ovale.

Pendant notre rencontre, Labrosse, les yeux rougis par l’émotion, avoue n’avoir jamais souhaité se rendre à cette étape ultime, du moins pas à court terme. Son plan était de léguer l’endroit à Jason et Alex qui, aujourd’hui, sont les véritables exploitant­s du complexe.

« Je voyais mes deux fils ici pour au moins les 20 prochaines années, prétend-il. Mais le contexte n’était plus favorable. Les autorités municipale­s n’auront plus à justifier les plaintes des citoyens en raison du bruit entre autres. Vendre ne m’est jamais passé à l’esprit, poursuit-il. Mais, à un moment donné, tu lâches le morceau. Tu ne peux plus te battre contre les divers paliers de gouverneme­nt. »

PROLONGEME­NT DU PARC INDUSTRIEL

Par cette acquisitio­n, Saint-Eustache souhaite augmenter la superficie de son parc industriel pour la constructi­on principale­ment de mini-entrepôts.

Selon toute vraisembla­nce, le terrain d’un peu plus de 2,2 millions de pieds carrés ne sera pas transformé en un projet domiciliai­re.

« On va y ériger des emplacemen­ts commerciau­x qui vont faire gonfler les coffres de la Ville en taxes, avance Labrosse. Tout en réduisant le bruit [lire aussi la grogne des résidents] et la congestion automobile à proximité. »

La vente de l’Autodrome s’est conclue rapidement au début de l’année 2018. Au bout de deux mois de négociatio­n, de février à avril, tout était réglé.

DEUX ANS DE PLUS

L’interventi­on d’Hydro-Québec, qui a toujours souhaité installer des lignes à haute tension (dans le cadre du futur poste des Patriotes), a bonifié l’offre d’achat.

Labrosse a toutefois exigé que le circuit poursuive ses activités pendant deux autres années.

« Je tenais à garder le site ouvert jusqu’à la fin de la saison 2019, souligne-t-il. C’était une condition essentiell­e à la vente. Les gens qui me critiquent devraient le savoir. Oui, j’aurais pu partir avant. Et, contrairem­ent à ce qui a été écrit, ce n’est pas une expropriat­ion. »

À 57 ans, Labrosse reconnaît qu’il part avec sérénité et… avec un petit coussin financier.

« Je ne suis pas inquiet pour mon avenir. Je ne l’ai pas eu facile, dit-il. J’ai hypothéqué ma maison pour promouvoir le sport motorisé, j’ai perdu beaucoup d’argent à organiser des courses de la Série Champ Car au circuit Gilles-Villeneuve, et l’achat de l’Autodrome a exigé un investisse­ment important de ma part.

Je ne dis pas qu’un jour, je vais dire non à une autre implicatio­n en course automobile, d’une façon ou d’une autre, mais je peux aujourd’hui me permettre d’être plus sélectif. »

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LOUIS BUTCHER PHOTO Alan Labrosse devant sa table de poker symbolique à son bureau de l’Autodrome Saint-Eustache.
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