Le Journal de Montreal

COLÉRE ACCEPTABLE ?

Serena Wiliams a été punie trop sévèrement par l’arbitre attitré à la finale féminine des Internatio­naux des États-Unis, estiment certains joueurs

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NEW YORK | (AFP) Excès de zèle de l’arbitre ? Sexisme ? Au lendemain de la finale féminine des Internatio­naux des ÉtatsUnis, hier, le monde du tennis a continué de s’interroger sur les raisons de la colère de Serena Williams, battue 6-2 et 6-4 par la Japonaise Naomi Osaka.

La star américaine, qui a laissé filer l’occasion de remporter un 24e titre du Grand Chelem, a écopé de 17000 $ d’amende hier pour ses trois avertissem­ents reçus pour « coaching », « bris de raquette », puis « insulte ».

Quand tout commence, Williams est dominée dans le jeu et vient de perdre la première manche 6-2. À 1-0 dans la seconde, Osaka mène 40-15 sur son service quand l’ex-no 1 mondiale reçoit un avertissem­ent pour « coaching », interdit pendant le match. L’arbitre, le Portugais Carlos Ramos, a décelé un geste de son entraîneur Patrick Moratoglou que la joueuse soutient ne pas avoir perçu.

S’ensuit une discussion en plusieurs épisodes avec l’arbitre de chaise qui s’envenime.

« Je ne triche pas pour gagner, je préfère perdre », se défend sur-le-champ l’Américaine. C’est incroyable ! Je n’ai pas reçu de coaching. Je n’ai jamais triché de ma vie. Vous me devez des excuses », reprend-elle au changement de côté, outrée.

C’est après un second avertissem­ent reçu pour avoir fracassé sa raquette qui lui vaut un point de pénalité que Serena sort de ses gonds.

« Vous attaquez ma personne. Vous avez tort ! Vous n’arbitrerez plus jamais un de mes matchs ! Vous me devez des excuses! C’est vous le menteur! ne décolère-t-elle plus.

« Vous êtes un voleur! Vous m’avez volé un point », l’accuse-t-elle. C’est à ce moment-là que l’arbitre portugais lui inflige un troisième avertissem­ent, synonyme de jeu de pénalité, une sanction rare à ce niveau.

Deux jeux plus tard, la star américaine s’incline dans la confusion et voit son rêve d’égaler le record absolu de titres du Grand Chelem (24) s’envoler.

RÈGLEMENT APPLIQUÉ AU PIED DE LA LETTRE

Ramos a appliqué le règlement au pied de la lettre. Ce que sanctionne l’arbitre par un premier avertissem­ent, c’est un geste des mains fait par l’entraîneur de Serena Williams depuis les gradins. Un geste que lui-même ne conteste pas. En revanche, l’entraîneur français critique la diligence de M. Ramos à servir un avertissem­ent, alors que ce genre de situation se produit à longueur de saison.

« Est-ce que j’ai coaché ? Oui, j’ai coaché. J’ai fait des gestes », admet Mouratoglo­u. Cent pour cent des entraîneur­s coachent dans cent pour cent des matchs, toute l’année, et tout le monde le sait. Dans cent pour cent des cas que j’ai vus, on prévient d’abord la joueuse. Il ne l’a pas fait. S’il avait prévenu Serena, il n’y aurait pas eu d’incident invraisemb­lable inutile, a-t-il jugé à Eurosport. C’est très regrettabl­e. »

Une position défendue par d’autres joueurs, actuels comme anciens.

« J’ai parfois reçu un préavertis­sement par l’arbitre, qui me disait : ‘‘Arrête ça ou je devrai te servir un avertissem­ent’’, s’est souvenu sur Twitter l’Américain James Blake, ancien no 4 mondial. Il aurait dû au moins lui donner cette chance. »

« Patrick a admis avoir coaché et il est clair qu’il a essayé de lui dire quelque chose, mais tout le monde coache, alors pourquoi ? » s’est interrogée la Française Kristina Mladenovic.

« Coacher devrait être autorisé au tennis. Ça ne l’est pas, et une joueuse se retrouve pénalisée pour une action de son entraîneur. Ça ne devrait pas arriver », a tranché l’emblématiq­ue Billie Jean King.

Si l’avertissem­ent pour bris de raquette n’est pas contesté, le troisième, pour « insulte », fait aussi débat.

« Il est dans son pouvoir de prendre cette décision, mais le bon sens aurait dû primer », a estimé l’ex-no 1 mondial Andy Roddick.

Serena Williams, comme plusieurs joueuses, a même vu une marque de « sexisme » dans la décision de l’arbitre.

« Dans un match masculin, ça ne se serait pas passé comme ça », a soutenu l’ex-no 1 mondiale Victoria Azarenka.

« Merci de dénoncer ce deux poids, deux mesures », a renchéri Billie Jean King.

LA WTA APPUIE SERENA

La WTA a estimé que la sanction infligée à Serena Williams relève d’une « différence de degré dans la tolérance face aux émotions exprimées par les hommes et les femmes », dans un communiqué émis hier.

« La WTA pense qu’il ne devrait pas y avoir de différence de degré dans la tolérance face aux émotions exprimées par les hommes et les femmes et s’engage pour s’assurer que tous les joueurs soient traités de la même façon. Nous ne pensons pas que ça a été le cas hier soir [samedi] », soutient le directeur de l’organisati­on, Steve Simon.

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