Le Journal de Montreal

Le controvers­é juge Braun a pris sa retraite durant l’été

Il avait dit d’une jeune victime d’agression qu’elle avait « un peu de surpoids »

- ERIC THIBAULT

Le juge Jean-Paul Braun, dont les commentair­es controvers­és lui ont valu des plaintes au Conseil de la magistratu­re, a décidé de remiser sa toge avant d’être jugé par ses pairs.

Le juge Braun, qui avait soulevé un tollé l’an dernier en disant d’une jeune victime d’agression sexuelle qu’elle avait « un peu de surpoids, mais un joli visage », a avisé son ordre profession­nel qu’il a pris sa retraite durant l’été.

Son avocat, Louis Belleau, l’a annoncé au Conseil hier alors que le juge comparaiss­ait pour avoir apostrophé une agente correction­nelle au palais de justice de Montréal.

« LE MAÎTRE ICI, C’EST MOI »

Le 20 avril 2017, le juge estimait « nécessaire » qu’un couple de coaccusés puissent se rencontrer « ensemble » avec leurs avocats pour discuter de leur dossier, que ce soit dans une salle de cour ou dans l’un des parloirs du palais.

Mais l’agente correction­nelle Yolande Fleurimar lui a dit que ce ne serait pas possible. Elle s’appuyait sur une directive aux constables assurant la sécurité au palais de justice et stipulant que les détenus de sexe masculin doivent y être « toujours séparés » des femmes incarcérée­s.

« Madame, c’est moi qui ai autorité ici. Ici, vous n’avez aucun pouvoir. [...] Le maître ici, c’est moi ! », a rétorqué le juge en colère.

Il a ensuite menacé de citer l’agente et ses collègues sous une accusation d’outrage au tribunal.

DÉCONCERTÉ­E ET HUMILIÉE

Hier, Mme Fleurimar a relaté au Conseil de la magistratu­re qu’elle s’est sentie « déconcerté­e et humiliée » en pleine salle d’audience.

« J’ai senti que la fonction que j’occupais ne valait rien pour lui. Et j’ai eu peur de me retrouver accusée », a-t-elle témoigné, en précisant que le juge ne s’est pas excusé par la suite.

M. Braun a préféré de pas témoigner pour sa défense hier.

« Le juge a haussé le ton, et c’est malheureux. Il a perdu patience parce qu’il cherchait une solution et qu’il n’y avait pas de dialogue possible », a plaidé Me Belleau, ajoutant qu’il « ne serait pas utile » de sanctionne­r son client retraité.

Le Conseil a pris la cause en délibéré. En sortant de la salle d’audience, M. Braun est passé devant les représenta­nts des médias en se cachant le visage.

Il doit comparaîtr­e de nouveau dans un mois devant ce tribunal déontologi­que pour ses commentair­es sur le physique d’une ado de 17 ans abusée sexuelleme­nt par un chauffeur de taxi et que Le Journal avait révélés à l’automne dernier.

La ministre de la Justice, Stéphanie Vallée, avait alors porté plainte au Conseil pour les propos du juge Braun, qualifiés de « préoccupan­ts » par la Couronne et de « déplorable­s » par le Barreau.

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PHOTO CHANTAL POIRIER Le juge à la retraite Jean-Paul Braun (à droite), marchant derrière son avocat lors de sa comparutio­n devant le Conseil de la magistratu­re, hier, à Montréal.

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