Suspendue pour avoir critiqué la Fédération des acériculteurs
Le MAPAQ lui reproche des manquements « graves » à ses obligations de loyauté
Nathalie Bombardier a l’intention de contester sa suspension de cinq jours imposée par le MAPAQ parce qu’elle a osé critiquer publiquement et à titre personnel le système de mise en marché de la Fédération des producteurs acéricoles du Québec.
Mme Bombardier, qui est inspectrice pour le MAPAQ, a reçu une lettre l’informant de sa suspension dès qu’elle reviendra au travail, au terme d’un congé parental.
Le ministère reproche à sa fonctionnaire d’avoir commis des manquements graves à ses obligations de loyauté et de s’être placée en situation de conflit d’intérêts en défendant et en militant pour son entreprise acéricole, située à Scotstown, en Estrie.
Pour la mère de famille de 41 ans, cette suspension est totalement inacceptable et injustifiée puisqu’elle porte atteinte à sa liberté d’expression.
Mme Bombardier a affirmé au Journal avoir signifié une déclaration d’intérêt dès qu’elle a commencé à s’impliquer dans le développement de l’érablière familiale, acquise par son conjoint Daniel Gaudreau, en 2002, plusieurs années avant qu’elle ne forme un couple avec lui.
« Ce qui avait été convenu avec mon patron, c’est que je n’inspectais pas d’érablière », dit-elle.
De fil en aiguille, les relations de Mme Bombardier avec la Fédération des producteurs acéricoles, membre de l’Union des producteurs agricoles (UPA), se sont envenimées, avec comme toile de fond une discorde sur l’attribution des contingents. Leur sirop d’érable a été saisi sous surveillance policière. La partie de bras de fer s’est enclenchée, ainsi qu’une longue saga judiciaire qui n’est toujours pas terminée. Elle et son conjoint font face à des pénalités de 600 000 $.
CRITIQUER L’ESTABLISHMENT
« Parce qu’on s’est débattus publiquement contre la Fédération, j’ai eu droit à une suspension. Pourtant, j’ai toujours été une bonne inspectrice. Pourquoi n’ai-je pas le droit de m’exprimer en politique, d’aimer ou de ne pas aimer un politicien? Je n’ai pas critiqué le MAPAQ. J’ai critiqué l’UPA qui a beaucoup trop de pouvoirs et la Fédération qui agit de façon cavalière. »
Dans la lettre de sanction, le MAPAQ demande également à Mme Bombardier de retirer sur les médias sociaux ses « likes » et ses commentaires.
Lors de ses prises de position, Mme Bombardier assure qu’elle n’a jamais mentionné son statut de fonctionnaire. « J’ai toujours parlé en tant qu’acéricultrice. »
Plusieurs intervenants du m o n d e a g r i c o l e a p p u i e n t Mme Bombardier dans sa défense.
UNE MESURE EXAGÉRÉE
« Il s’agit d’un litige entre une productrice de sirop et un syndicat en situation de monopole, le tout sous la supervision de la Régie des marchés agricoles. Ces deux organisations ne devraient pas avoir de lien direct avec le MAPAQ. Cela m’apparaît pas mal exagéré », a réagi Maxime Laplante, président de l’Union paysanne, selon qui la liberté d’expression de Mme Bombardier est enfreinte.
La suspension sera appliquée lors de son retour au travail en novembre. Son syndicat a été saisi du dossier. Mme Bombardier interpelle les chefs des partis politiques pour que son droit fondamental à la liberté d’expression soit respecté. Le MAPAQ n’a pas voulu commenter le cas de Mme Bombardier pour des raisons de confidentialité.