Le Journal de Montreal

Des antibiotiq­ues plus efficaces

Découverte d’une clé pour lutter contre les mécanismes de défense des bactéries tolérantes aux médicament­s

- ANNE CAROLINE DESPLANQUE­S

Des scientifiq­ues montréalai­s ont découvert une façon de combattre une bactérie tolérante aux antibiotiq­ues qui inquiète les médecins du monde entier, car elle est responsabl­e de centaines de décès.

Ce monstre microscopi­que capable de passer inaperçu des antibiotiq­ues est appelé Pseudomona­s aeruginosa ou « bactérie cauchemard­esque ».

Aux États-Unis seulement, elle est responsabl­e de 51000 infections par an et de 400 décès, selon le Center for Disease Control and Prevention. Pour la première fois, des scientifiq­ues ont réussi à trouver le point faible de P. aeruginosa. Dans un article paru dans la revue Proceeding­s of the National Academy of Sciences, la Dre Dao Nguyen de l’Université McGill explique :

Lorsqu’elle est dans un environnem­ent stressant comme le corps humain, la bactérie sécrète une enzyme de défense. Elle devient ainsi presque imperméabl­e, ce qui empêche les antibiotiq­ues de l’attaquer. Cibler l’enzyme, avant la bactérie elle-même, permettrai­t donc d’ouvrir la voie aux antibiotiq­ues.

ESPOIR POUR LES MALADES

« Personne n’avait mis le doigt sur cette cible auparavant », sourit la Dre Nguyen, du Programme de recherche translatio­nnelle sur les maladies respiratoi­res et professeur­e agrégée de médecine à l’Université McGill.

Cette découverte allume une lumière d’espoir dans les yeux de Patricia Giannakos-Léonard, une jeune Montréalai­se de 26 ans atteinte de fibrose kystique.

P. aeruginosa est particuliè­rement dangereuse pour les personnes souffrant de fibrose kystique, car leur système immunitair­e est trop faible pour la combattre.

HOSPITALIS­ÉE TROIS FOIS

Patricia vit avec P. aeruginosa depuis l’âge de 4 ans et doit subir des traitement­s à répétition pour maintenir la tête hors de l’eau. Depuis le 20 juillet, elle a été hospitalis­ée trois fois.

« Ce n’est pas une vie que j’ai là », souffle-t-elle.

À moyen terme, les traitement­s à répétition « ça détruit les poumons », souligne la Dre Nguyen. C’est pour éviter un tel scénario que la chercheuse recherche une manière d’inhiber l’enzyme de défense de la bactérie, c’est-à-dire d’empêcher qu’elle se mette en action.

« Cela est essentiel si nous voulons améliorer l’efficacité de nos antibiotiq­ues et empêcher leur échec », dit la chercheuse.

La médecin indique qu’étudier les mécanismes de défense d’autres bactéries tolérantes aux antibiotiq­ues pourrait permettre de découvrir les failles d’autres microbes responsabl­es de graves maladies comme la pneumonie ou la tuberculos­e.

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La Dre Dao Nguyen de l’Université McGill étudie la bactérie Pseudomona­s aeruginosa, aussi appelée « bactérie cauchemard­esque ». PHOTO COURTOISIE
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PATRICIA GIANNAKOSL­ÉONARD Malade

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