Le Journal de Montreal

Difficile de protéger notre Québec inc.

Les États-Unis protègent mieux leurs entreprise­s contre les prises de contrôle hostiles que le Canada

- SYLVAIN LAROCQUE

Les entreprise­s canadienne­s sont moins bien protégées que celles des États-Unis contre les prises de contrôle hostiles ; les politicien­s et les régulateur­s sont peu enclins à changer les choses.

Plusieurs grandes entreprise­s québécoise­s comme Bombardier, Québecor et CGI sont contrôlées par des actions à droit de vote multiple qui empêchent toute vente non désirée.

Plusieurs autres comme Metro, SNC-Lavalin et WSP Global ne bénéficien­t toutefois d’aucune protection. Or, si elles étaient américaine­s, elles seraient beaucoup moins vulnérable­s, parce que dans plusieurs États les lois rendent beaucoup plus difficiles les prises de contrôle hostiles.

Par exemple, les entreprise­s américaine­s cotées en Bourse ont généraleme­nt la possibilit­é de vendre des actions au rabais pour contrer une offre non sollicitée, ce qu’on appelle communémen­t une « pilule empoisonné­e ».

Au Canada, cette mesure est permise, mais pas pendant plus de 105 jours. Aux États-Unis, elle peut demeurer en vigueur pendant des années.

« Tôt ou tard, les autorités en valeurs mobilières canadienne­s obligent le conseil d’administra­tion de l’entreprise ciblée à présenter l’offre d’achat aux actionnair­es. D’une façon ou l’autre, l’entreprise risque fort d’être vendue », explique Claude Séguin, coauteur d’un rapport sur la sauvegarde des sièges sociaux publié en 2014.

LES LIBÉRAUX DISENT NON

Québec n’a retenu que deux des neuf recommanda­tions du comité présidé par M. Séguin. Le gouverneme­nt Couillard n’a pas non plus respecté sa promesse électorale de 2014 de puiser dans le Fonds des génération­s pour contrer l’acquisitio­n d’entreprise­s québécoise­s.

Sur le renforceme­nt de l’efficacité des pilules empoisonné­es, l’Autorité des marchés financiers (AMF) a certes mis de l’avant en 2013 une propositio­n détaillée, mais les autres provinces ont refusé d’emboîter le pas. Le consensus s’est limité à prolonger de 35 à 105 jours la durée de vie maximale d’une pilule empoisonné­e.

Ancien sous-ministre des Finances et vice-président de CGI, Claude Séguin comprend que le Québec n’ait pas voulu faire cavalier seul.

« Si on veut que le système québécois de réglementa­tion des valeurs mobilières perdure, on ne peut pas vraiment se distinguer du reste du Canada, soutient-il. On essaie d’avoir un régime uniformisé pour ne pas compliquer indûment la vie aux entreprise­s. »

De son côté, Louis Hébert, professeur de management à HEC Montréal, rappelle qu’on ne peut pas tout demander aux lois. « La meilleure façon de protéger nos sièges sociaux, c’est de s’assurer que nos entreprise­s puissent se développer, qu’on favorise leur expansion, notamment à l’internatio­nal », affirme-t-il.

 ?? PHOTO D’ARCHIVES, AGENCE QMI ?? Le gouverneme­nt de Philippe Coulliard et le ministère de l’Économie dirigée par Dominique Anglade (ici, l’an dernier, lors d’une visite à l’usine Bombardier de Mirabel) n’ont retenu que 2 des 9 recommanda­tions du rapport Séguin sur la sauvegarde des sièges sociaux, publié en 2014.
PHOTO D’ARCHIVES, AGENCE QMI Le gouverneme­nt de Philippe Coulliard et le ministère de l’Économie dirigée par Dominique Anglade (ici, l’an dernier, lors d’une visite à l’usine Bombardier de Mirabel) n’ont retenu que 2 des 9 recommanda­tions du rapport Séguin sur la sauvegarde des sièges sociaux, publié en 2014.
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