Les lois de la finance transposées au théâtre
L’art de la chute transpose, avec humour, le spectateur dans le monde de l’argent
Quelle est la valeur des choses ? C’est avec pédagogie, intelligence et humour que L’art de la chute dresse un parallèle exquis entre la finance et l’art contemporain au Théâtre La Licorne.
Ayant en filigrane des faits réels, soit la chute de la banque d’investissement Lehman Brothers ainsi qu’un encan sans précédent de l’artiste britannique Damien Hirst en septembre 2008, cette pièce pose la question de l’influence de l’économie dans nos vies, et plus spécifiquement dans l’art, malheureusement aussi dominé par l’argent.
On suit donc Alice, une artiste québécoise en résidence à Londres, en mal d’inspiration, qui rencontre un trader qui a fait fortune grâce à la crise financière de 2008, mais qui est aussi engagé dans le marché de l’art contemporain. Leur relation la propulsera dans les hautes sphères de son domaine.
LE TEMPS FILE
Même si la pièce est longue, le temps file à la vitesse de l’éclair. La première partie est plus didactique. On y aborde davantage certains phénomènes financiers ou liés au monde de l’art, tandis que la seconde se concentre sur le sort des personnages. Un bel équilibre.
L’enchaînement rapide de tableaux disparates autant dans leur forme et que leur fond offre du rythme et de l’originalité. Par exemple, on navigue d’explications sur les lois du libéralisme économique en se basant sur la vente de homard, à un karaoké en passant par un bulletin de nouvelles. Le tout parsemé d’humour de qualité. Un solide travail du metteur en scène Jean-Philippe Joubert pour cette production qui a gagné un prix de la critique de Québec, après y avoir été présentée l’an dernier au Théâtre Périscope.
UN TRAIN D’ENFER
Ce spectacle se déroule donc à un train d’enfer. Les comédiens Jean-Michel Girouard, Simon Lepage, Danielle Le Saux-Farmer, Marianne Marceau et Pascale Renaud-Hébert jonglent habilement avec différents personnages, sautant avec aisance d’un accent français à l’anglais britannique ou américain.
Réussie, la fin révèle les blessures des deux anciens amants. Comme dans les forces du marché, il y aurait donc un gagnant et un perdant ? « Mais moi, je ne jouais pas. J’étais amoureux de toi », dira l’un des protagonistes.
Allez voir cette oeuvre, ne serait-ce que pour découvrir qui l’affirme. Cela pourrait vous surprendre.