Le Journal de Montreal

Les deux courses

- MATHIEU BOCK-CÔTÉ mathieu.bock-cote @quebecorme­dia.com

Comme le notait Joseph Facal hier dans sa chronique, la course à trois des dernières semaines, où la CAQ, le PLQ et le PQ pensaient se disputer le pouvoir, avec QS traînant loin derrière, s’est transformé­e ces derniers jours en deux courses à deux.

D’un côté, la CAQ et le PLQ se battent pour le pouvoir, de l’autre, le PQ et QS sont en lutte pour savoir lequel sera le principal parti souveraini­ste.

POUVOIR

La course pour le pouvoir met en scène deux partis qui acceptent le cadre canadien.

Le PLQ, on le sait, a une adhésion identitair­e au Canada. Pour ses leaders et ses membres, notre appartenan­ce au Canada est un bien en soi et jamais ils n’envisagera­ient de la remettre en question. Ils préfèrent un Québec faible dans un Canada uni à un Québec fort affranchi du cadre fédéral. Avec Philippe Couillard à sa tête, le PLQ n’est plus le parti des héritiers de Robert Bourassa, mais une succursale idéologiqu­e de celui de Justin Trudeau. D’ailleurs, il fait une promotion militante du multicultu­ralisme canadien.

La CAQ voit le Canada autrement. Globalemen­t, il s’agit d’un engagement pragmatiqu­e. Bien des caquistes ont déjà voulu la souveraine­té et ils l’ont moins abandonnée parce qu’ils seraient devenus passionnel­lement fédéralist­es que parce qu’ils en sont venus à croire qu’elle n’arriverait jamais. Comme on dit, ils se sont fait une raison. Mais ils demeurent attachés au Québec d’abord. La CAQ, malgré ses tentatives à répétition pour séduire les anglophone­s et les communauté­s culturelle­s, demeure un parti fondamenta­lement enraciné dans le Québec francophon­e. D’ailleurs, la CAQ se dit nationalis­te et n’a pas peur de l’enjeu identitair­e. Ce n’est pas rien.

SOUVERAINE­TÉ

La course pour diriger le camp souveraini­ste est d’une autre nature, et cela, en bonne partie parce que l’idée d’indépendan­ce est en régression et semble condamnée à demeurer pour longtemps dans l’opposition, même dans les marges. D’ailleurs, les ressorts identitair­es les plus intimes du peuple québécois semblent aujourd’hui brisés.

Le PQ demeure l’expression politique principale du nationalis­me historique québécois. Mais c’est un parti handicapé, toujours occupé à donner des gages au système qu’il combat. C’est aussi le parti qui représente la social-démocratie, ou si on préfère, le centre-gauche. Ses militants et ses électeurs y adhèrent d’abord et avant tout parce qu’ils placent la cause souveraini­ste au centre de leur engagement politique.

QS est d’abord un parti de la gauche radicale. Lorsqu’on prend la peine de s’y intéresser vraiment, on constate que convergent dans sa base militante les courants les plus extrémiste­s. QS n’est pas le parti des gens ordinaires, mais des marges radicales. Pour QS, la souveraine­té n’a de sens que si elle est au service de la gauche radicale. Depuis toujours, l’objectif de QS, c’est d’en finir avec le PQ et de le remplacer. Sur le plan identitair­e, QS est plus proche des libéraux que des deux autres partis.

La course pour la troisième place n’est pas insignifia­nte : à travers elle se joue en partie l’avenir de la cause souveraini­ste.

Il y a deux courses en ce moment.

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