Deal or no Deal, monsieur Trudeau ?
Depuis quelques semaines, le premier ministre Justin Trudeau déclare à qui veut l’entendre qu’il vaut mieux ne pas avoir de deal avec les États-Unis plutôt qu’avoir un mauvais deal.
Chrystia Freeland, sa ministre des Affaires étrangères, répète le même refrain. Mais quel deal offre donc Donald Trump ? Pour l’instant, on n’en sait rien, mais son offre est RE-FU-SÉE ! Dans l’émission Le banquier, il est arrivé parfois qu’un participant espérant toujours un plus gros magot se retrouve le bec à l’eau. Si la même chose nous arrivait ? David n’a gagné qu’une seule fois contre Goliath et c’est arrivé plusieurs siècles avant Jésus-Christ.
LÂCHER DU LEST
Si on veut signer un nouvel accord de libre-échange avec les États-Unis, il faudra bien lâcher du lest quelque part, puisque Trump ne veut plus entendre parler de l’accord actuel. Parmi les clauses remises en question, il y a celle qui concerne l’exception culturelle. Pour nous, francophones, l’exception culturelle est un enjeu majeur.
L’an dernier, l’UNESCO a mis à jour la convention sur la diversité culturelle, dont le Canada est signataire. Le numérique jouit désormais de la même protection qu’on accorde au cinéma, au théâtre et au livre. Grâce à cette convention (dont procède l’exception culturelle), chaque pays peut à sa guise les protéger et les subventionner.
Les États-Unis n’en considèrent pas moins que plusieurs États ayant signé la convention, le Canada plus particulièrement, s’en prévalent pour bloquer des importations de biens et services et même des produits agricoles sous prétexte qu’ils sont liés à une « expression culturelle », à un patrimoine qu’ils veulent protéger.
UN PAVÉ DANS LA MARE
À la fin d’août, Keith Mahar, un consultant canadien qui vit maintenant en Australie, a jeté un pavé dans la mare. Il a fait parvenir une lettre à Robert Lighthizer, le négociateur américain, pour lui rappeler qu’avec « la complicité du CRTC » et sous couvert de « diversité culturelle », le Canada en profite pour subventionner des séries de télévision au détriment de celles que font les producteurs américains.
La lettre a fait son effet jusqu’à la Maison-Blanche. Depuis, le principe de l’exception culturelle est remis en question par le président américain.
Le fait que le nouvel accord conclu entre le Canada et l’Union européenne ne contienne pas de clause générale protégeant la diversité culturelle, mais seulement quelques exceptions, affaiblit encore notre position vis-à-vis les États-Unis. Pourquoi leur demanderait-on ce qu’on n’a pas exigé de l’Europe ? Ou des pays d’Asie quand on a conclu le Partenariat transpacifique ?
L’EXEMPLE DU PAPE !
Si les États-Unis et le Mexique signent un accord bilatéral et que Washington laisse tomber l’ALENA, Donald Trump sera alors libre de nous causer tous les ennuis imaginables. Un accord, quel qu’il soit, limiterait au moins les dégâts. Si le nouvel accord s’avère être mauvais, qu’on accepte d’emblée la possibilité d’y mettre fin après cinq ans, comme le veulent les Américains. Dans cinq ans, Donald Trump sera près de quitter la Maison-Blanche, si ce n’est déjà fait.
Lundi, après avoir signé avec Pékin une entente reconnaissant les évêques nommés par le gouvernement chinois, le pape François a déclaré : « Un mauvais accord vaut mieux que pas d’accord du tout ! » Bon catholique comme il est, Justin Trudeau devrait méditer ces sages paroles du pape.
Pour nous, francophones, l’exception culturelle est un enjeu majeur