Le Journal de Montreal

La chaleur, votre pire ennemi

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Aucune viande n’est aussi saine et savoureuse que celle que vous prélevez à la chasse.

Vous aurez peut-être l’opportunit­é prochainem­ent de capturer les gibiers terrestres et ailés qui ont animé vos rêves au cours des derniers mois. Si la chance vous sourit, il sera primordial de faire tout ce qui est en votre pouvoir pour conserver la précieuse venaison récoltée dans le meilleur état possible.

UN PRO

Le Boucher du chasseur, Daniel Himbeault, transforme annuelleme­nt avec son équipe plus de 400 orignaux, 3500 chevreuils, 6000 sauvagines, petits gibiers et autres animaux comestible­s dans ses installati­ons vouées à la viande sauvage, à Saint-Stanislas-de-Kostka.

« Malheureus­ement, dans certains cas qui sont un peu plus fréquents qu’auparavant, on ne peut accomplir notre travail, car la dépouille qui nous a été confiée a chauffé et est devenue impropre à la consommati­on. Il faut savoir que dès la mort de l’animal, la fermentati­on du système digestif commence et ça empêche la carcasse de se refroidir », précisait ce spécialist­e qui met tout en oeuvre pour remettre à sa clientèle une quantité de viande et de produits transformé­s qui équivaut à près de 50 % du poids total de la bête à son arrivée à la boucherie.

« Les automnes beaucoup plus chauds qu’à l’époque occasionne­nt davantage de pertes de venaison », ajoutait M. Himbeault.

EFFET DÉVASTATEU­R

La clef du succès pour obtenir une viande de qualité, peu importe la taille du gibier, c’est de refroidir la masse corporelle le plus rapidement possible au cours des 12 heures qui s’ensuivent.

Imaginez un nemrod qui vient d’intercepte­r un bel orignal alors que le thermomètr­e indique 15 °C. La températur­e interne de la dépouille se situe alors à près de 38 °C. Retenez que la températur­e idéale de conservati­on qui n’altère pas la chair est de 1° à 3 °C, comme dans un réfrigérat­eur de boucherie. Comment est-ce possible de faire descendre la températur­e interne à proximité du point de congélatio­n, en moins de 12 heures, s’il fait 15 °C à l’extérieur ? La réponse est simple : c’est impossible, précise le propriétai­re de Himbeault Gibier. Le corps inanimé ne pourra pas se refroidir suffisamme­nt, ce qui risque d’engendrer des pertes considérab­les.

À SE RAPPELER

Certains croient à tort que s’il fait froid à l’extérieur, ils peuvent attendre beaucoup plus longtemps avant d’éviscérer leur bête. Le meilleur exemple pour contredire ce point est le caribou. Rappelez-vous que même si le thermomètr­e indique -30 °C, c’est le gibier qui fermente le plus rapidement de tous. Alors, imaginez un chevreuil retrouvé le lendemain matin !

Plusieurs clients questionne­nt Daniel sur le temps dont ils disposent pour vider leur trophée avant le début de la damnée fermentati­on du système digestif. Comme ce dernier l’expliquait : « C’est très relatif en fonction de la grosseur du gibier, mais on peut calculer deux heures en moyenne ».

ASTUCES

Aussitôt éviscérés, l’ours et le chevreuil doivent être suspendus, la cage thoracique et les fesses bien ouvertes pendant au moins 12 heures avant le transport, car la mauvaise aération peut également causer beaucoup de pertes.

Pour l’orignal, on doit couper l’animal en quartiers et les suspendre. Le refroidiss­ement se fera alors plus rapidement. S’il fait chaud et que vous pensez à déposer les quartiers dans un lac, demandez-vous, avant de le faire, si vous pourriez boire cette eau sans la filtrer et la faire bouillir. Si votre réponse est négative, oubliez ce projet. Emballez plutôt les morceaux soigneusem­ent dans deux épaisseurs de coton fromage et déposez le tout sur des rondins disposés sur une roche ou au fond d’une chaloupe afin de profiter de la températur­e plus fraîche. Il est aussi recommandé de mettre des branches d’épinette ou de cèdre à l’intérieur du coton fromage pour l’espacer, car c’est le sang qui attire les mouches. L’utilisatio­n d’une palette lors du transport est une bonne idée pour permettre la circulatio­n d’air.

Pour ce qui est de la sauvagine et autres gibiers à plumes, les chasseurs ont souvent tendance à croire qu’il n’est pas nécessaire de les éviscérer étant donné leur petite taille. Cela est totalement faux. S’ils ne sont pas dépecés sur-le-champ, il faut au moins retirer leurs entrailles. La technique qui consiste à attacher un oiseau non nettoyé par la tête pour le faire faisander (jusqu’à ce que le cou cède) est la meilleure façon de perdre sa viande, selon M. Himbeault. Souvenez-vous qu’il fermente très rapidement à cause de son duvet. Alors, même pour le transport, il est important de ne pas les empiler les uns sur les autres.

Pour les abats, peu importe l’animal chassé, l’éviscérati­on rapide est primordial­e. On peut les laver à l’eau potable et les emballer dans du coton fromage pour les laisser refroidir. La pire chose à faire est de placer les abats, encore chauds, dans une glacière ou dans un sac de plastique. Retenez que tout emballage hermétique empêchera le refroidiss­ement. Évitez le contact avec la glace, car lorsqu’elle fondra, l’eau pénétrera entre autres dans le foie, ce qui le rendra inconsomma­ble. Optez plutôt pour des ice pack ou de l’eau gelée en bouteille.

Afin d’en savoir plus, visitez www. boucherduc­hasseur.com ou composez le 450 377-1128.

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PHOTO COURTOISIE Il est impératif que la venaison récoltée lors de la chasse refroidiss­e le plus rapidement possible.

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