« Je me suis dit que l’accident de ma fille n’avait servi à rien »
Une mère déplore des traverses non protégées et l’absence de barrière dans des gares
Une Montréalaise dont la fille a été gravement blessée par un train de banlieue l’an dernier n’en revient pas que la société de transport exo décide de supprimer des passages interquais dès aujourd’hui, au lieu d’installer des barrières ou des passerelles au-dessus des rails.
Il y a un an, Samia Achiche se trouvait à bord du train qui a heurté sa fille Léticia, alors âgée de 17 ans, à la gare Roxboro-Pierrefonds. La jeune fille, pressée de prendre son transport, tentait de rejoindre le quai d’en face et n’avait pas vu le train arriver dans son dos.
« D’un coup, tout s’est arrêté, se souvient-elle. J’ai vu le sac de ma fille au sol, du sang partout, et puis son corps plié comme celui d’une poupée. Le train l’avait traînée sur 15 mètres. »
Par miracle, la jeune Léticia n’est pas décédée, mais elle a subi de graves blessures. Il a fallu l’opérer huit fois pour remettre en place son bassin et soigner un fémur, une épaule, un coude et des cotes. Deux autres interventions seront encore nécessaires.
« Aujourd’hui, elle a l’air normale, mais sa vie n’est plus comme avant, déplore sa mère. Elle faisait du mannequinat, mais c’est fini. Elle a de la misère à dormir à cause de douleurs au dos. Elle a repris ses études au cégep, mais c’est difficile. »
RAGE
Quand elle a appris la mort au début septembre d’un adolescent de 13 ans happé par un train sur un passage interquai, comme sa fille, Mme Achiche a senti la rage monter en elle.
« Je me suis dit que l’accident de ma fille n’avait servi à rien », déplore-t-elle.
« Nous avons pleuré toute la soirée. Ma fille m’a dit que ça aurait pu finir comme ça pour elle », confie la mère de quatre enfants.
En réaction à ce décès, la société de transport exo a décidé d’éliminer à compter d’aujourd’hui trois des six traverses piétonnières sans barrière présentes dans les gares de Bois-Franc, Du Ruisseau et de Roxboro-Pierrefonds.
GENS PRESSÉS
Mais Samia Achiche craint que cette solution accroisse le risque d’accident.
« Beaucoup de gens empruntent ces passages, ils sont pressés et, si on les oblige à faire un détour, ils le seront encore plus », soutient-elle.
La mère de famille, qui a dû se résoudre à
« NORMALE, AUJOURD’HUI, MAIS ELLE SA VIE A L’AIR N’EST PLUS COMME AVANT. [...] ELLE A DE LA MISÈRE À DORMIR À CAUSE DE DOULEURS AU DOS. » – Samia Achiche, la mère de Léticia
reprendre le train malgré les images terribles qu’elle garde en tête, déplore également le fait qu’exo persiste à rejeter la faute de l’accident sur la distraction des jeunes usagers.
« Ces passages sont dangereux pour tout le monde et ils le resteront tant qu’on n’ajoutera pas des barrières ou que l’on ne les remplacera pas par des passerelles », soutient-elle.
Exo répond que ces passages sont conformes aux normes de Transports Canada et que l’ajout de passerelles ou de barrières serait complexe et coûteux, alors que le Réseau express métropolitain (REM) s’apprête à remplacer le train actuel.
La société de transport affirme toutefois que des brigadiers resteront mobilisés dans les gares pour le moment.
Selon exo, trois accidents se sont produits sur des traverses interquais depuis 2007, dont deux en un an.