Le Journal de Montreal

Vincent Graton et le méprisable chiffon

En ce moment, tout le monde parle de laïcité, de port de signes religieux, de crucifix.

- SOPHIE DUROCHER sophie.durocher @quebecorme­dia.com

Tous ceux qui parlent à ce sujet devraient voir Quand les pouvoirs s’emmêlent, un film passionnan­t animé par Vincent Graton, sur la façon dont les religions font mauvais ménage avec les droits des femmes.

Mettons que j’ai été agréableme­nt surprise que ce comédien et commentate­ur de gauche soit si lucide dans sa dénonciati­on des religions. Toutes les religions.

LES RELIGIONS SEXISTES

Graton s’est promené au Maghreb, aux États-Unis, en France et au Québec pour démontrer que les religions sont obsédées par le corps des femmes et par les droits reproducte­urs des femmes. Voir Graton interviewe­r une féministe française qui dit « Merde aux curés » ou une féministe tunisienne qui raconte qu’elle est sous protection policière parce qu’elle critique « les islamistes », ça étonne. Comme ça fait du bien d’entendre une femme rabbin dire que « La question de la femme reste LA question problémati­que de toutes les religions ».

Je vous jure, je n’en croyais pas mes oreilles quand j’ai entendu Graton dire ce que certains commentate­urs disent depuis des années, soit que « les femmes sont les premières victimes du communauta­risme », parce qu’il banalise la polygamie, les mariages forcés et l’excision. Enfin !

Ça fait du bien de voir un artiste québécois qui n’a pas un petit discours gnangnan de relativism­e culturel.

En fait, ce documentai­re percutant devrait non seulement être vu par des journalist­es et des politicien­s, mais on devrait le montrer dans nos écoles, dans les cours d’éthique et de culture religieuse.

Vous savez quelle est l’image qui m’a le plus ébranlée dans ce documentai­re ? On y voit des images en noir et blanc de Bourguiba, président tunisien, dans les années 50, qui enlève le hijab, le voile, de la tête des femmes. Imaginez, un homme qui enlève le foulard des femmes, parce qu’il le considère comme un « misérable chiffon ».

Il n’y a pas une seule de nos néo-féministes québécoise­s qui diraient ça du foulard, elles le banalisent et le défendent ! C’est le monde à l’envers.

Lors de son passage en Tunisie, Vincent Graton interviewe une militante qui affirme : « On n’obtiendra l’égalité homme femme pleine et entière que s’il y a une séparation entre l’État et la religion ». Quand Graton l’informe qu’au Québec, un crucifix est placé au-dessus des députés à l’Assemblée nationale, elle part à rire et s’exclame : « C’est mal barré ! »

Peut-être que Sonia LeBel, François Legault et les autres catho-laïcs devraient voir ce film…

DOCUMENTAI­RES DE VEDETTES

C’est la mode aujourd’hui de demander à des vedettes d’animer des documentai­res. On l’a vu avec Pénélope McQuade et Troller les trolls, réalisé par Hugo Latulippe. Une ami réalisateu­r de documentai­re me disait récemment que les diffuseurs, quand on leur présente un projet, demandent toujours : « C’est qui la vedette ? », alors qu’avant ils demandaien­t : « C’est quoi le sujet ? ». On peut déplorer que le nom de Vincent Graton soit plus connu que celui de Yvonne Defour qui a réalisé Quand les pouvoirs s’emmêlent.

Mais si cette visibilité peut faire en sorte que plus de gens voient ce film important, alors vive le vedettaria­t ! Et vive Vincent Graton !

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