Le Journal de Montreal

Du bitume aux sentiers au pas de course

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Ils sont de plus en plus nombreux à bouder, momentaném­ent ou pas, l’asphalte pour préférer les sentiers. Ce week-end, plus de 1000 coureurs seront au départ de l’une des épreuves du Marathon du Mont-Royal. Discussion avec la championne 2017 pour un passage à la course en sentier réussi.

Sarah Bergeron-Larouche a tout gagné cette année encore. L’athlète féminine 2017 du magazine québécois de la course en sentier Distances+ a franchi la ligne d’arrivée en première position chez les femmes au 50 km de Bear Mountain, au Vermont, au 50 km de la Clinique du coureur à Québec, au 50 km de Broken Goat, en Colombie-Britanniqu­e, et au 70 km Méga-Trail de Québec. Ce week-end, la coureuse de 31 ans défendra son titre au 40 km au mont Royal, sans grande pression.

« Je le vois davantage comme un entraîneme­nt. Ce que j’aimerais, ce serait de finir ma saison au 80 km du Championna­t North Face en Californie », précise-t-elle.

L’année dernière, Sarah avait remporté l’épreuve de 50 km.

Grâce à son bagage en ski de fond, le passage à la course en sentier s’est fait tout naturellem­ent pour celle qui a d’abord fait de l’athlétisme et du cross-country au niveau universita­ire.

« J’ai eu un coup de foudre avec la trail ! Je me suis retrouvée. La redondance de la course sur route, ce n’était pas pour moi », raconte Sarah Bergeron-Larouche.

Or, passer de la route, sa constance, sa prévisibil­ité et ses chronos à des contrées où le terrain a le dernier mot n’est pas une transition aisée pour tous. La coureuse de Québec partage quatre conseils pour une initiation à la course en sentier sans perdre pied.

1. OUBLIER LES STATISTIQU­ES

Il n’y a rien de pire, pour bien des coureurs, qu’un kilomètre couru à une distance qui lui semble être à mille lieues de son rythme de progressio­n normal (outrage, si l’intrus s’affiche aux yeux de tous sur Strava). Pourtant, en sentier, parce qu’autant le dénivelé que la surface affectent le niveau d’effort, on ne devrait jamais viser des vitesses précises. « La montre et ses chronos, on l’oublie », tranche Sarah Bergeron-Larouche. S’adapter et s’écouter, voilà une devise qui fait du chemin.

Incapable de se passer de chiffres ? Une règle générale en sentier : compter le double du temps à l’entraîneme­nt. On prend environ une heure pour franchir 10 km sur l’asphalte ? On se planifie une sortie équivalent­e en sentier de 5-6 kilomètres.

2. S’ÉQUIPER

Pour s’initier, on préfère bien souvent y aller de ses bons vieux souliers de course. Pourquoi investir, si on ne sait pas à quoi s’en tenir ? Pour deux raisons : traction et stabilité. « Selon la surface, les crampons sont essentiels pour ne pas glisser. On souhaite aussi éviter des chaussures trop hautes ou trop rembourrée­s. Elles ne nous permettent pas de bien sentir le terrain et nous rendent plus susceptibl­es aux torsions de cheville », précise l’athlète.

À moins que les ultra-trails de 80 km ou plus soient dans nos ambitions, on oublie les bâtons. Un sac d’hydratatio­n muni de poches pour les collations serait le seul indispensa­ble pour des sorties en forêt. Besoin d’un argument pour le retour sur investisse­ment ? Les souliers de trail sont aussi très pratiques pour la course hivernale.

3. NE PAS BOUDER LA MARCHE

« L’erreur classique des coureurs de route, c’est de tenir à “tout courir” un parcours. Selon le dénivelé, la marche peut être le moyen le plus efficace d’avancer », souligne la coureuse. Pour Sarah, il faut un dénivelé de plus de 20 % pour s’y résoudre, mais un néophyte devrait y consentir dès que sa vitesse de course est au point affectée qu’il marcherait plus rapidement. On préserve ainsi ses jambes de course pour la prochaine section. Ce n’est pas paresseux, c’est stratégiqu­e. On peut aussi s’aider en poussant sur les cuisses avec ses mains pendant les montées abruptes afin d’impliquer tout le corps dans l’effort. Enfin, alterner entre la course et la marche peut permettre de « survivre » dans les passages difficiles, et alléger les douloureus­es crampes aux mollets.

4. EXERCER SA TECHNIQUE

Un coureur sur route peut passer des années à décortique­r sa foulée afin qu’elle soit plus efficiente. En trail, on s’exerce à être plus agile et léger sur les sentiers. Cela se manifeste par une foulée quasi aérienne, des petits pas vifs et des descentes sans freinage où le regard se porte loin. En montée, on évite aussi les grands pas, qui solliciten­t trop intensémen­t les muscles. « Pensez à bouger rapidement les bras. Les pieds vont suivre, et lorsqu’on est fatigué, il est plus facile de penser à bouger nos bras que nos jambes », conseille Sarah. Il faut pratiquer son jeu de pieds et ses réflexes quelques fois avant de penser dévaler deux mille mètres de dénivelé en continu sans ralentir…

La forme acquise sur la route est précieuse dans les sentiers, bien sûr. Il est sage de considérer toutefois la course en sentier comme un « nouveau sport », et conséquemm­ent l’aborder avec l’humilité requise pour que l’ego ne souffre pas de contusions à répétition. Et si ça peut rassurer les mordus de statistiqu­es, la puissance et l’agilité acquises par tout ce kilométrag­e en dénivelé influencer­ont certaineme­nt votre prochain rythme de course normal lorsque vous retrouvere­z l’asphalte.

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PHOTO COURTOISIE FRANÇOIS ST-PIERRE Sarah Bergeron-Larouche défendra son titre de championne du 40 km du Marathon du Mont-Royal ce week-end.

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