Le Journal de Montreal

D’ado agressée à star du porno

Après avoir vécu un enfer entre l’âge de 13 et 18 ans, elle combat « le feu par le feu » en tournant des films XXX

- ALEX DROUIN

Une femme qui a été abusée sexuelleme­nt pendant son adolescenc­e est devenue une vedette du porno pour ne pas avoir de blocage avec les hommes.

Audrey Bérubé, alias Amanda Belluci, a longuement hésité à parler des abus sexuels répétés dont elle a été victime entre l’âge de 13 et 18 ans.

La femme de 25 ans a porté plainte contre son agresseur, mais il n’a jamais été accusé. Elle l’a simplement rayé de sa vie et affirme vouloir maintenant regarder vers l’avant.

Cependant, elle est convaincue que les agressions dont elle a été victime l’ont poussée vers une carrière de danseuse nue et d’actrice pornograph­ique par la suite.

« Je ne voulais pas avoir de blocage envers les hommes ni m’apitoyer sur mon sort », a raconté la femme native de la Gaspésie.

Comme elle le dit elle-même, elle a combattu le feu par le feu et ne voulait pas que son agresseur ait réussi à faire d’elle une victime pour le reste de sa vie.

CONFIANCE EN ELLE

Après cinq ans d’abus, elle avait perdu toute confiance en elle en arrivant à l’âge adulte.

Selon Mme Bérubé, la porno l’a aidée à devenir plus forte et à retrouver sa confiance en elle.

C’est également lors de cette triste période d’abus sexuels répétés qu’elle a commencé à regarder très souvent du porno.

C’était pour elle une façon de se réfugier et d’oublier les sévices.

Elle adorait regarder du porno pour voir le désir dans les yeux de l’acteur XXX lorsqu’il regardait et admirait la femme devant lui. Une admiration que son agresseur n’a jamais eue envers elle. Il n’y avait que de la cruauté dans son regard, selon elle.

« Les films pornos m’ont permis de réaliser que je voulais devenir un objet de désir. Être quelque chose que tous les hommes voulaient avoir », dit-elle pour expliquer son désir de devenir actrice porno.

DANSEUSE NUE

Or, c’est comme danseuse nue qu’elle a commencé à se dévêtir pour gagner sa vie à l’âge de 18 ans. Deux ans plus tard, elle faisait ses débuts dans l’univers du porno.

Elle est d’abord entrée en contact par Facebook avec un acteur de porno québécois alors qu’elle cherchait à en savoir plus sur cette industrie qui l’attirait tant.

L’acteur lui a permis d’obtenir sa première audition alors qu’il l’a mise en contact avec une compagnie québécoise de films pornograph­iques. Trois semaines plus tard, elle rencontrai­t le président de cette compagnie pour une entrevue.

« Il voulait voir ma personnali­té et qui j’étais comme personne », a raconté l’actrice en mentionnan­t que l’entrevue a été faite de manière respectueu­se, et ce, sans avoir à se déshabille­r.

Trois mois plus tard, elle tournait sa première scène avec cette compagnie. Ça a alors pris neuf heures de tournage pour une vidéo de 28 minutes.

Sa première année dans l’industrie du XXX lui a permis d’amasser 11 000 $ pour une quinzaine de scènes. En un peu plus de cinq ans de carrière, elle compte une quarantain­e de scènes à son actif et a estimé à 20000 $ sa meilleure année dans cette industrie.

Encore aujourd’hui, elle reconnaît que les tournages peuvent la rendre nerveuse puisqu’elle veut offrir la meilleure performanc­e possible devant la caméra.

MOMENTS EMBARRASSA­NTS

Maman d’un garçon d’un an et huit mois, Audrey Bérubé reconnaît qu’il est parfois difficile de concilier sa vie de mère et celle d’actrice porno.

Une femme l’a déjà apostrophé­e en lui montrant ses seins alors que l’actrice se trouvait au Parc Safari avec son fils qui venait d’avoir un an. La femme voulait savoir si elle avait fait un bon investisse­ment en regardant ses implants mammaires.

Elle a eu droit à un autre moment embarrassa­nt alors qu’elle se trouvait aux Galeries de Terrebonne avec son fils et ses cousines de 13 et 16 ans. Deux hommes l’ont alors approchée en y allant de commentair­es sur ses performanc­es à l’écran. Ils ne se sont jamais souciés du fait que l’actrice était entourée d’enfants.

« Certaines personnes manquent de classe, c’est clair », a-t-elle pesté en mentionnan­t qu’elle reste toujours polie envers ses fans malgré ce genre de conduite inappropri­ée.

Sans oublier la cinquantai­ne de photos nues qu’elle reçoit par semaine d’hommes, de femmes ou de couples sur son compte Facebook.

À cause de ces gestes déplacés, elle reconnaît qu’elle songe parfois à mettre un terme à sa carrière de danseuse et d’actrice. Toutefois, elle se donne encore trois ans avant de se retirer de ce milieu afin de réaliser son rêve d’avoir un ranch.

Bien que son fils soit trop jeune pour comprendre le travail de sa mère, Audrey Bérubé sait qu’elle devra un jour lui expliquer le métier qu’elle a exercé pendant quelques années.

« C’est une job comme une autre. Peut-être qu’il aura honte, mais c’est à moi de lui expliquer pourquoi j’ai fait ce métier et que j’ai su me respecter là-dedans tout en respectant mes limites », dit-elle sans détour.

DE TOUTES LES COULEURS

Comme c’est le cas pour la plupart des scènes de tournage dans l’industrie du X, les acteurs découvrent seulement lors de la journée du tournage qui sera leur partenaire de jeu.

« Une scène avec une fille peut me rapporter 550 $ et avec un homme, 750 $. Si je dois faire un trio, ça peut grimper à 1500 $ », a expliqué Audrey Bérubé.

Elle déplore que ce ne soit pas toutes les maisons de production qui demandent aux acteurs de passer régulièrem­ent des tests pour les ITS.

« Je trouve ça dégueulass­e celles qui ne le demandent pas parce que notre santé sexuelle est très importante », dit-elle.

Audrey Bérubé a toujours refusé de travailler pour de petites compagnies qui filment dans des endroits inappropri­és et qui ne se soucient pas de la santé des acteurs.

« C’est illogique et irrespectu­eux pour les acteurs ainsi que pour notre industrie », a-telle maugréé.

UN PLAISIR PERDU

La femme de 25 ans ne se cache pas pour dire qu’elle aime le sexe, mais reconnaît que les tournages sont exigeants et peu excitants.

La plupart du temps, la scène qu’elle tourne ne lui apporte aucun plaisir sexuel.

« On oublie carrément notre plaisir parce que les scènes de tournage sont très mécaniques et répétitive­s », dit-elle.

Ses moments d’intimité avec les hommes se sont également détériorés au fil des dernières années. Ses partenaire­s lui demandent d’agir en actrice porno lorsque vient le temps de passer à la chambre à coucher.

Sans oublier que ce n’est pas rare qu’elle doive simuler l’orgasme, trop habituée de faire semblant comme dans ses films.

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