Le Journal de Montreal

Fin de règne sous haute tension

Le dernier chef connu de la mafia montréalai­se avait les policiers et des rivaux à ses trousses

- ERIC THIBAULT Rizzuto est toujours accusé de possession illégale de cocaïne et de deux pistolets semi-automatiqu­es trouvés chez lui lors de son arrestatio­n. Son procès est prévu dans trois semaines.

Le règne du dernier chef de la mafia montréalai­se s’est achevé dans un climat si explosif que les policiers lui ont même demandé de « calmer le jeu sur le terrain ».

C’est ce qu’on apprend dans les documents judiciaire­s de l’opération Magot, qui a fait éclater une alliance formée par la mafia, les Hells Angels et les gangs de rue pour se partager le marché de la drogue il y a trois ans.

Les interdits de publicatio­n qui touchaient les détails de cette enquête ont été levés après la condamnati­on du chef de gang Gregory Woolley à une peine de huit ans, vendredi.

L’alliance était minée par des dissension­s au sein de la mafia, alors dirigée par Stefano Sollecito, qui avait succédé au parrain Vito Rizzuto, mort en 2013.

DES CONTRATS

Le 6 novembre 2015, l’Escouade régionale mixte de lutte au crime organisé appréhenda­it une flambée de violence en avertissan­t Sollecito et le fils du défunt parrain, Leonardo Rizzuto, qu’ils étaient visés par des contrats de meurtre de rivaux.

« La situation de violence devient tellement préoccupan­te [...] que la police demande à M. Sollecito de calmer le jeu sur le terrain », a relaté le juge Daniel Bédard dans une décision portant sur cette affaire.

Sollecito et Rizzuto ont été appréhendé­s deux semaines plus tard.

Durant l’été 2015, les policiers avaient aussi enregistré à leur insu une réunion entre Woolley, Sollecito et Rizzuto. Le trio discutait de « problèmes de territoire » à Rivière-des-Prairies, de leur crainte d’être dénoncés à la police par des « taupes » et de la possibilit­é « d’éliminer certaines personnes », écrivait le juge Bédard.

La police avait également saisi une « liste noire » de noms de mafiosi dont la tête était mise à prix lors d’une perquisiti­on chez des proches d’un gang de motards associé aux Hells, les Devils Ghosts.

HUILE SUR LE FEU

Deux autres crimes avaient jeté de l’huile sur le feu de ces tensions internes. Le 29 septembre de cette même année, l’immeuble abritant les bureaux de l’ex-avocat du clan Rizzuto, Loris Cavaliere, a été la cible d’un cocktail Molotov, sur le boulevard Saint-Laurent. C’est là que Sollecito, Rizzuto et Woolley avaient été espionnés par la police un mois plus tôt.

Cette tentative d’incendie criminel coïncidait avec les funéraille­s de Claudio Marco Campellone, un jeune mafieux abattu en face de chez lui à Rivière-des-Prairies.

Campellone, le père de Stefano Sollecito, Rocco, et quatre autres mafiosi identifiés d’opérations de surveillan­ce policière dans le projet Magot ont péri assassinés entre 2014 et 2018.

Stefano Sollecito et Leonardo Rizzuto ont finalement été libérés d’accusation­s de gangstéris­me et de complot, en février dernier, parce qu’ils ont fait l’objet d’écoute électroniq­ue illégale dans les bureaux de l’avocat Cavaliere. Personne n’a officielle­ment succédé au premier à la tête de la mafia.

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PHOTO D’ARCHIVES, MARTIN ALARIE Stefano Sollecito, qu’on voit ici en août 2017, a été averti par la police qu’un contrat de meurtre avait été passé sur lui.
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LEONARDO RIZZUTO Accusé

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