Le Journal de Montreal

Le français pour les nuls

- DENISE BOMBARDIER denise.bombardier @quebecorme­dia.com

Avis aux lecteurs : n’écrivez pas que je moralise, que je suis élitiste et autre bêtise de la sorte.

Ne me dites pas que la langue française est trop difficile et complexe. C’est notre langue maternelle. Demandez aux Arabes, aux Japonais, aux Chinois de vous parler de leur langue respective qu’ils ne réussissen­t à maîtriser qu’après dix années à travailler sans relâche pour l’écrire correcteme­nt.

Ne me dites pas non plus que l’orthograph­e et la syntaxe sont des détails, qu’il s’agit de s’exprimer, de se faire comprendre avec ou sans l’accord du participe passé, avec ou sans un trait d’union, même si on écrit « françait » en parlant de la langue.

L’échec massif des futurs professeur­s à l’examen de français à l’université, et ce, depuis des décennies, nous oblige à dresser un constat plus que douloureux, plus que déprimant. L’enseigneme­nt du français au Québec aux niveaux primaire et secondaire est calamiteux.

DÉNI

Les futurs enseignant­s sont le produit d’une incompéten­ce sociale, politique et culturelle d’un Québec qui n’a plus le respect de lui-même. Un Québec dont la langue est atteinte d’une maladie sournoise, non reconnue. Nous sommes collective­ment dans le déni. L’échec lamentable de ces futurs maîtres quand il s’agit de réussir un test de la langue aux difficulté­s en principe minimes pour ceux qui espèrent enseigner à nos enfants, donc pour ceux qui vont servir de modèles de référence, n’annonce pas des lendemains qui chantent pour notre avenir linguistiq­ue.

Les candidats à l’enseigneme­nt primaire devraient être choisis parmi les meilleurs. Leurs conditions de travail, dont le salaire, devraient être rehaussées. Une société croit à l’éducation publique de qualité lorsqu’elle valorise ses maîtres, sans qui les enfants ne peuvent pas progresser intellectu­ellement.

Il est faux d’affirmer que les Québécois aiment leur langue et ont à coeur l’éducation. Les statistiqu­es canadienne­s démontrent le contraire. Au Canada anglais, l’éducation est d’abord un objectif des parents, et le niveau de diplomatio­n supérieur à celui du Québec est là pour le prouver.

Le nouveau ministre de l’Éducation, Jean-François Roberge, qui a enseigné 17 ans au niveau primaire, a écrit un essai intitulé Et si on réinventai­t l’école ? La volonté manifestée par le premier ministre François Legault de placer l’éducation au centre de son action politique explique donc son choix du nouveau ministre.

FAIBLESSES

Nos faiblesses endémiques en matière d’enseigneme­nt du français sont les conséquenc­es des choix catastroph­iques de génération­s de technocrat­es au ministère de l’Éducation.

Que l’enseigneme­nt de l’anglais connaisse des problèmes aux ÉtatsUnis, que celui du français en France inquiète le ministre actuel, le politicien le plus populaire de son pays, qui a décidé de remonter le niveau général d’enseigneme­nt, ne justifie pas le cuisant échec de l’enseigneme­nt du français au Québec, une société fragilisée dans sa culture.

Nous avons besoin d’une révolution éducative après tant d’années de détériorat­ion. Notre langue souffre, nos jeunes sont les victimes de nos délires éducationn­els passés, et les enseignant­s qui ne pratiquent pas le corporatis­me syndical sont transformé­s en boucs émissaires.

Au secours, monsieur le ministre de l’Éducation !

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L’enseigneme­nt du français au Québec est calamiteux

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