Les filles nous font mentir
Alyson Charles et Courtney Lee Sarault, seules médaillées canadiennes du jour
CALGARY | Qui a dit qu’il fallait oublier des podiums féminins en l’absence de Kim Boutin et depuis les départs de Marianne St-Gelais et Valérie Maltais ? Courtney Lee Sarault et Alyson Charles nous ont fait mentir dès la première Coupe du monde de patinage de vitesse de leur vie, hier à Calgary, en enlevant respectivement une médaille d’argent et de bronze.
L’entraîneur de l’équipe féminine, Frédéric Blackburn, doit posséder le même pouvoir de persuasion que les meilleurs vendeurs d’aspirateurs. Aucune de ses cinq patineuses n’a participé à une Coupe du monde auparavant, mais il leur a tout de même demandé de laisser un message à chacune de leurs courses. Peu importe le prestige de leurs concurrentes, elles ne devront jamais l’avoir facile, a-t-il insisté.
L’AUDACE DE SARAULT
C’est justement ce qu’on a vu en finale du 1500 m de la part de Courtney Lee Sarault. Cette athlète originaire du Nouveau-Brunswick, fille d’Yves, un ancien choix de troisième ronde du Canadien en 1991, a étalé tout le potentiel qui l’habite. À 18 ans seulement, cette vice-championne mondiale junior de la saison dernière a démontré du cran en effectuant un dépassement audacieux à l’intérieur sur la numéro un mondiale, la Coréenne Min Jeong Choi. Sarault a finalement échappé l’or en se faisant coiffer à la ligne par une longueur d’orteil par la Néerlandaise Suzanne Schulting.
« Je suis heureuse de cette médaille d’argent, mais je vise toujours le meilleur, alors je suis un peu déçue de la fin de ma course. C’était presque l’or, mais je me dois malgré tout d’être satisfaite d’être rendue ici et de remporter une première médaille », a commenté avec aplomb l’étoile montante du centre national d’entraînement de Montréal.
« Je ne la connais pas beaucoup, mais je sais clairement qu’elle est une battante. Je l’ai toujours comparée à Marc Gagnon. On dirait qu’elle voudrait se suicider avant la course, tellement elle se pose de questions, mais quand la course débute, elle ne s’en pose plus. Elle agit », a illustré Blackburn, rassuré que son message a été entendu par ses recrues.
Un vent de fraîcheur souffle sur cette équipe féminine en ce début de cycle olympique. Avec le troisième rang d’Alyson
Charles en finale du 500 m, on perçoit même une douce chaleur des Caraïbes. Née d’un père d’origine haïtienne et d’une mère québécoise, la résidente originaire du quartier Saint-Michel à Montréal a créé une belle surprise en se faufilant jusqu’au podium.
Fière, la communauté haïtienne de Montréal vient de s’offrir un nouveau sujet d’actualité.
« Oui, surtout qu’on n’est pas vraiment reconnu pour exceller dans les sports d’hiver », corrobore la patineuse de 20 ans, qu’on décrit aussi performante à l’école.
« Je n’y croyais pas [à la médaille] et ce n’était pas dans mes objectifs. J’étais venue surtout pour apprendre. La majorité des patineuses contre lesquelles je patine ici, je les avais seulement vues à la télé, alors j’ai décidé d’y aller une course à la fois. Je me sentais bien et puis, une fois rendue en demi-finale, je me suis dit : OK, j’ai la chance de faire la finale. »
UN SYMBOLE
Quelques minutes après ce podium inattendu d’Alyson Charles, on a assisté à une scène amusante. Valérie Maltais, nouvelle résidente de Calgary pour les besoins de sa nouvelle carrière à la longue piste, s’est prêtée au rôle d’animatrice au milieu de la patinoire en posant quelques questions à la médaillée de bronze.
On a vu quelque chose comme un symbole dans leur conversation entendue dans tout l’amphithéâtre. D’un côté, il y avait l’aînée, au riche passé en courte piste et qui annonce déjà de belles promesses dans sa récente conversion à la surface de 400 m. Devant elle, il y avait la jeunesse, prête à lui succéder.