Amis postiers, attention de tomber !
Les postiers font la grève. Je veux bien être respectueux de leurs revendications et de la réalité de leur travail. Cependant, ils devraient garder à l’esprit qu’il est extrêmement risqué pour quiconque de faire la grève dans une industrie en décroissance.
Jusqu’à ce jour, ces grèves ont peu dérangé. Puisqu’il s’agit de grèves tournantes, des villes et des régions sont touchées tour à tour pour une période d’un jour. Le retard du courrier est si minime qu’une majorité de gens ne s’en rendent même pas compte. On pourrait dire que l’opinion publique est présentement neutre et désintéressée par ce moyen de pression.
En même temps, une grève qui dérange si peu met bien peu de pression sur l’employeur. Nous sommes loin d’une crise de la livraison postale, donc la direction de Postes Canada est loin de s’énerver. La grève est en ce sens un peu inutile.
GRÈVE GÉNÉRALE ?
La tentation syndicale sera bientôt de durcir le ton. Voudra-t-on pousser la note jusqu’à y aller d’une grève générale prolongée ? À la veille de la période critique de la livraison des colis de Noël, le moment pourrait paraître « stratégique ». Les syndicats cherchent ces moments critiques pour prendre leur employeur en otage.
Parce que j’aime les hommes et les femmes qui pratiquent ce métier honorable, je les invite à énormément de prudence avant de se lancer dans une pareille offensive. Deux énormes dangers guettent les postiers s’ils jouent le tout pour le tout.
Premièrement, l’opinion publique qui leur est naturellement sympathique pourrait abruptement se retourner contre eux. Souvenons-nous qu’il y a trois ans le gouvernement fédéral et la direction de Postes Canada mettaient fin à la livraison du courrier à domicile. Une bonne partie de la population était parfaitement à l’aise avec cette décision.
Une proportion grandissante de citoyens, en particulier chez les plus jeunes, reçoit très peu de correspondance dans le courrier, mis à part des circulaires non souhaitées. Ceux-là accepteraient mal de voir Postes Canada s’engouffrer dans des déficits devant être renfloués par les contribuables.
TOUT PERDRE
Deuxièmement, les employés des postes devraient se souvenir qu’ils font face à de la concurrence, surtout dans le secteur en croissance des colis. D’autres compagnies de livraison salivent déjà en imaginant une grève des postes à la veille des Fêtes. Leurs livraisons de colis pourraient connaître un essor inespéré.
Dans un tel scénario, plusieurs de ces clients perdus pour Postes Canada pourraient ne jamais revenir. D’ailleurs, les grévistes m’exaspèrent lorsqu’ils parlent en mal des colis comme ayant compliqué leur travail. Le grand nombre de livraisons de colis découlant du commerce en ligne a tout simplement SAUVÉ leur emploi.
Même phénomène pour le courrier. Les gens qui utilisent encore le courrier pour des comptes, par exemple, sont de moins en moins nombreux. Si une grève des postes les poussait à regarder de plus près l’option de la facture électronique, eux non plus ne reviendront jamais.
Voici un syndicat en danger de se tirer dans le pied.