Le Journal de Montreal

L’HOMME POUR QUI LE HOCKEY A TOUJOURS ÉTÉ UN JEU

Martin Brodeur fait son entrée au Panthéon du hockey

- MARC DE FOY marc.defoy@ quebecorme­dia.com

NEWARK, New Jersey | L’élection de Martin Brodeur au Panthéon du hockey était une formalité. Une sensation bizarre l’a néanmoins envahi lorsque le président du panthéon, Lanny McDonald, lui a communiqué la nouvelle, le 26 juin dernier.

« Tu ne le réalises pas vraiment », dit-il dans son bureau du Prudential Center, domicile des Devils du New Jersey.

« Tu prends une pause pour penser à ce que ça représente. C’est tellement grandiose. J’ai fait mes succès, mais là, c’est un comité qui te porte à la postérité. C’est spécial. C’est la cerise sur le “sundae” ! »

L’HISTOIRE D’UNE VIE

C’est toute sa vie qui défilera dans sa mémoire lorsque sa plaque sera accrochée dans le grand hall du temple, lundi soir, à Toronto.

Le hockey est entré dans son univers alors qu’il avait quatre ans. Il était à quatre mois de célébrer son 43e anniversai­re de naissance quand il a disputé son dernier match, en 2015 avec les Blues de Saint-Louis.

« Tu penses à ta famille et à tes parents qui t’ont appuyé dans ton cheminemen­t », continue-t-il.

« Mon père sera dans mes pensées. C’est dommage qu’il ne soit plus là, mais j’ai eu la chance de l’avoir longtemps. Il aurait aimé faire carrière dans le hockey. Par contre, il s’est fait un nom en tant que photograph­e.

« On a vécu de belles expérience­s ensemble. Il aurait aimé vivre cette fin de semaine. »

LA PERFECTION EN TOUT

Denis Brodeur est décédé à deux semaines de son 83e anniversai­re en 2013. Il s’est illustré, lui aussi, à titre de gardien de but. En 1956, il a aidé le Canada à remporter la médaille de bronze aux Jeux olympiques de Cortina d’Ampezzo, en Italie.

La qualité de ses photos sportives était reconnue à travers l’Amérique du Nord. En 2006, la Ligue nationale de hockey a acheté sa collection qui se chiffrait à 110 000 photograph­ies croquées sur une période de 40 ans.

Il a transmis à son fils les valeurs qu’il avait relevées chez les grands athlètes qu’il avait photograph­iés au fil du temps, en particulie­r Jean Béliveau, Wayne Gretzky et Gary Carter. « Cet aspect était primordial pour lui », raconte Martin Brodeur.

« Il fallait que je fasse bien les choses dans tout. Il lui arrivait de me dire comment je devais me comporter même dans la Ligue nationale. »

RIEN D’ACQUIS

Brodeur se souvient du message que lui avait fait son paternel lorsque les Devils l’ont choisi au 20e rang du repêchage de la LNH, en 1990.

« À partir de maintenant, tu n’es qu’un numéro », m’avait-il lancé, relate Brodeur.

« Ce n’est pas parce que tu as été repêché que tu vas jouer dans la Ligue nationale. Travaille fort et comporte-toi bien pour que ton numéro soit tiré. Ça m’a aidé. »

À son arrivée dans l’organisati­on des Devils, il a fait connaissan­ce avec l’entraîneur des gardiens, Jacques Caron, Abitibien d’origine qui a roulé sa bosse pendant 22 ans dans les rangs profession­nels.

« On a bâti une relation père-fils », dit Brodeur.

« Jacques tenait à ce que je connaisse du succès. C’est avec lui que je passais le plus de temps dans le métier et à qui je me confiais. Il était proche de Lou Lamoriello. C’est à travers lui que j’ai appris à connaître Lou. »

Lamoriello était le maître à bord chez les Devils. Tout passait par lui. Il avait la réputation d’être contrôlant. Mais il était loyal avec ceux qui l’étaient avec lui.

Jacques Lemaire, Larry Robinson et Jacques Laperrière ont fait tout pour lui et il le leur rendait bien. Il a accompagné Pat Burns dans son long combat contre le cancer.

DIFFÉRENT DES AUTRES GARDIENS

Au-delà de ses nombreux exploits, on se rappelle Martin Brodeur pour sa simplicité, sa bonne humeur et son amour du hockey.

Pour lui, le hockey a été un jeu du début à la fin de sa carrière. Il lui arrivait de chanter devant son filet.

Il n’était pas comme les autres gardiens. Il parlait aux journalist­es les matins des matchs jusqu’à ce que le responsabl­e des relations avec les médias de son équipe le tire de là, et encore.

Il semblait toujours en contrôle et pourtant…

« C’était l’image que je voulais projeter à mes coéquipier­s et à tout le monde, mais il n’en était pas toujours ainsi », confie-t-il.

« J’avais mes moments. Je vais vous raconter une histoire à titre d’exemple. Dernièreme­nt, je jouais au golf avec un ami lorsque des outardes se sont mises au travers notre chemin. On tentait de les faire fuir, mais elles ne bougeaient pas. Elles étaient figées sur place.

« J’ai dit à mon chum que j’étais comme ça quand je jouais. J’avais l’air calme, mais les pattes me débattaien­t en tabarnouch­e sous l’eau ! Tu rassures les gens autour de toi quand tu es en contrôle de tes moyens. C’était le cas les trois quarts du temps, mais je suis humain. Les choses allaient moins bien certains soirs. »

Comme cette fois où il avait été déjoué par un dumping du défenseur Sandis Ozolinsh, des Mighty Ducks d’Anahein, en finale de la Coupe Stanley de 2003. Il avait étendu son bâton pour freiner la course de la rondelle, mais le disque avait dévié entre ses jambières. « Je suis parti à rire », se souvient-il. « Chaque fois que j’accordais un mauvais but, je prenais la chose avec détachemen­t. Ça ne m’affectait pas. J’étais capable d’oublier. J’aimais jouer au hockey. »

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