Hantée par son passé
Ce qu’on sait Des aveux
À la commission Charbonneau, Roger Desbois, qui était alors cadre pour la firme de génie Tecsult, avait affirmé avoir fait du financement illégal, à Saint-Jérôme, notamment. Entre 2006 et 2008, M. Desbois dit avoir remis 5000 $ par année à Christian Côté, l’organisateur politique du maire de l’époque, Marc Gascon. Lors du scrutin 2009, il dit avoir remis beaucoup plus, soit 50 000 $. Lors du procès de Tony Accurso l’automne dernier, l’ex-ingénieur de Tecsult et ex-collecteur de fonds de Gilles Vaillancourt, Marc Gendron, a dit avoir donné un immense pot-de-vin de 500 000 $ à la Ville de Saint-Jérôme pour un projet d’infrastructure municipale qui totalisait 69 millions $. M. Gendron s’est souvenu avoir versé le pot-de-vin sur cinq ans, mais n’a pas mentionné sous quel maire ces sommes ont été
versées, ou de quel contrat il s’agissait.
Il se reconnaît coupable
√ Un ancien directeur de l’ingénierie à la Ville, Érick Frigon, a reconnu devant le conseil de discipline de l’OIQ que quatre firmes de génie-conseil se sont partagé les contrats de services professionnels entre 2002 et 2010 à Saint-Jérôme, grâce à un système de collusion « bien rodé ». Ces firmes étaient Dessau, Tecsult, Cima+ et LBHA.
M. Frigon s’est reconnu coupable d’avoir « toléré » ce stratagème en décembre 2016. Il s’agit d’infractions au Code de déontologie des ingénieurs, et non d’accusations criminelles.
Où en est-on ?
En février 2017, Le Journal a publié un reportage montrant l’étendue du système de collusion à Saint-Jérôme. Ce n’est qu’à ce moment que le maire de la Ville, Stéphane Maher, a été mis au courant des aveux de M. Frigon devant son ordre professionnel.
Le maire a alors assuré avoir déclenché une nouvelle enquête interne pour réviser l’ensemble des contrats professionnels accordés par la Ville entre 2002 et 2010. Il avait fait part de ces nouvelles informations concernant Érick Frigon à l’UPAC.
M. Maher estimait alors que les contribuables avaient perdu entre 50 et 75 millions $ sous l’administration Gascon. √ Un mois après la publication de notre reportage, la Ville a créé le Bureau de l’intégrité professionnelle et administrative (BIPA) et l’ex-chef de police de Montréal et député de la CAQ, Jacques Duchesneau, a été nommé à sa tête.
« La seule chose qu’on peut dire, c’est que le BIPA travaille étroitement avec l’UPAC au moment où on se parle », assure Stéphane Maher.
Le BIPA ne peut nous donner plus d’information au sujet de l’avancement de l’enquête de l’UPAC. « Notre travail est de faire des vérifications. Dès qu’il y a une dimension criminelle, le dossier est envoyé à L’UPAC. À partir de là, on ne fait pas de suivi pour savoir s’il y a une progression », explique Lyne Dunberry, du BIPA.
Un ancien maire de la Ville, Jean-Claude Hébert, se dit déçu du travail de l’UPAC. « Les enquêteurs ont été de passage. Ils n’ont pas fouillé pour aller loin », dit-il. Ce dernier dit avoir rencontré deux analystes de l’UPAC, jusqu’en 2015. Il attend toujours un retour d’appel du corps policier.
Grâce au programme de remboursement volontaire et à la surveillance des contrats par le BIPA, la Ville a pu récupérer 2 millions $, selon M. Maher.