Le Journal de Montreal

PAPA RENTRE À LA MAISON

Erik Guay confirme sa retraite à 37 ans après une brillante carrière au sein de l’équipe canadienne de ski alpin

- Alain Bergeron ABergeronJ­DQ alain.bergeron @quebecorme­dia.com

Une semaine éprouvante a convaincu Erik Guay que les vitesses folles et les risques extrêmes du ski alpin ne valent plus le coup. Le skieur canadien le plus prolifique de l’histoire a confirmé hier sa retraite en marge de la Coupe du monde de Lake Louise.

Ennuyé par une blessure récurrente au dos qui lui a fait rater les Jeux olympiques de Pyeongchan­g, l’athlète de MontTrembl­ant découvrait peu à peu qu’il n’avait plus la conviction pour retrouver les standards d’excellence qui avaient fait sa marque de commerce. Sa décision définitive de rentrer à la maison s’est prise au bout d’un long moment de réflexion dans sa chambre d’hôtel, mercredi soir, après avoir vu son coéquipier Manuel Osborne-Paradis subir une double fracture à la jambe gauche, quelques heures plus tôt lors de la première descente d'entraîneme­nt.

Guay avait quand même pris le départ, mais son 69e rang a trahi les effets que cet accident venait de causer sur sa motivation. Ce fut le déclic.

« Quand Manny a chuté et que l’hélicoptèr­e est venu le chercher, ça m’a tout pris pour entrer dans le portillon de départ. Je n’avais plus envie. Je sais que c’est un sport à risque et ça ne me dérange pas de prendre les risques si c’est pour un podium ou la chance d’en faire un. Mais quand tu prends des risques pour finir 30e, dans mon esprit, ça ne vaut pas la peine », nous a expliqué l’athlète de 37 ans, qui avait aussi été affecté par une lourde chute d’un autre coéquipier, Broderick Thompson, durant un entraîneme­nt à Nakiska la semaine dernière.

« KAREN, MA DÉCISION EST PRISE »

Durant sa conversati­on avec Le Journal et quelques heures plus tard, lors de son annonce publique à la station de Lake Louise, Guay n’a échappé aucun sanglot ni trémolo. Sa riche carrière l’y aurait pourtant autorisé, ne serait-ce que pour ses 25 podiums en Coupe du monde, un sommet pour un skieur canadien qui, depuis décembre 2013, a relégué aux archives les 20 de Steve Podborski.

Rien de tout cela. Aucun regret ne l’habitera. Il lui a fallu une heure de tranquilli­té, mercredi soir, seul dans sa chambre d'hôtel sur les rives du lac Louise, pour trancher le débat dans son esprit. Au terme de son raisonneme­nt, il a appelé son épouse.

« Écoute, Karen, ma décision est prise. Je vais annoncer ma retraite », nous a-t-il raconté.

« Je voulais être sûr de mon affaire. Je ne voulais pas l’appeler pour lui demander ce qu’elle en penserait si je prenais ma retraite. Comme n’importe qui d’autre, elle m’aurait dit : “Non, tu peux continuer, tu en as encore dans le corps.” Elle aurait essayé de me pousser, mais je tenais vraiment à ce que ça vienne de moi. »

ENSUITE, « STEF »

Après son amoureuse, il a composé le numéro de son frère Stefan, l’un des entraîneur­s de l’équipe canadienne de vitesse, pour l’inviter à sa chambre.

« Stef, merci pour tout, mais je passe à autre chose », a-t-il annoncé à son frère benjamin.

« Il s’en doutait. Il m’a dit : “On voyage ensemble depuis tellement longtemps, on sentait ça venir”. »

« JE ME SENS LIBÉRÉ »

Ironiqueme­nt, Guay a annoncé qu’il quitte son sport au pied de la même montagne où il avait gravi le premier de ses 25 podiums en Coupe du monde. C’était le 29 novembre 2003, alors qu’il avait terminé deuxième de la descente.

On ne le verra donc pas en Suède, en février prochain, pour y défendre son titre de champion du monde du super-G acquis en 2017 dans la station mythique de Saint-Moritz, en Suisse.

« C’est une belle journée. Je me sens libéré », nous a assuré Guay au sujet de ses adieux à son sport.

Finis, les perpétuels déchiremen­ts avec son épouse, ses quatre fillettes et ses proches, qui sont toute sa vie, afin d’aller provoquer le diable à des vitesses de 130 km/h.

Papa rentre à la maison.

 ?? PHOTO D’ARCHIVES, CHANTAL POIRIER ?? Erik Guay se consacrera dorénavant entièremen­t à sa conjointe Karen et à leurs quatre filles, soit Leni, Logann, Marlo et la petite Maude née à l’automne 2017.
PHOTO D’ARCHIVES, CHANTAL POIRIER Erik Guay se consacrera dorénavant entièremen­t à sa conjointe Karen et à leurs quatre filles, soit Leni, Logann, Marlo et la petite Maude née à l’automne 2017.

Newspapers in French

Newspapers from Canada