Un phénomène connu mais rarement dénoncé
QUÉBEC | Le phénomène des agents du service correctionnel qui commettent de graves fautes de comportement et utilisent la violence contre les détenus est connu du milieu carcéral, mais rarement dénoncé.
« Ce n’est pas nouveau que les agents correctionnels dérogent aux règles et aux procédures », affirme le criminaliste Jean-Claude Bernheim.
Or, en analysant les sanctions réservées aux agents qui ont commis des fautes, Me Bernheim remet en question le sérieux des établissements de détention. « Il ne semble pas y avoir beaucoup de variation dans les sanctions, ce qui peut nous laisser croire qu’il n’y a pas trop de prise en considération », indique le criminaliste.
« Si un agent correctionnel abuse de son pouvoir, qu’il ne respecte pas les règles, il doit faire face à ses responsabilités. Et l’employeur a l’obligation d’agir […] Si dans les faits un agent correctionnel commet un crime en lien avec sa fonction, en théorie, il devrait perdre son emploi. »
Selon lui, la nuance entre un crime commis dans le cadre du travail et à l’extérieur de la prison est importante. Par exemple, un agent qui aurait été accusé de conduite avec les facultés affaiblies aurait droit à une sanction moins sévère. « Dans un cas comme celui-là, il n’y a pas vraiment de lien entre le crime et l’emploi. »
ENCADREMENT
La Direction générale des services correctionnels a mis en place en 2014 une procédure administrative qui doit encadrer le traitement des manquements des ASC. Elle souligne qu’une personne incarcérée qui croit avoir été victime de mauvais traitements peut s’adresser aux autorités ou communiquer avec le Protecteur du citoyen.
D’ailleurs, les dénonciations de sévices physiques présentées par des détenus sont « systématiquement transmises » au Protecteur du citoyen.
« Ce n’est pas la bonne façon de faire. Le Protecteur du citoyen n’est pas là pour remplacer l’obligation de l’employeur de s’assurer que ses employés agissent conformément aux règles et aux lois, réplique Jean-Claude Bernhein. Il ne faut pas voir le Protecteur du citoyen comme l’instance qui doit discipliner le personnel. »
« PEU FRÉQUENTES »
De son côté, le MSP indique ne pas vouloir « minimiser la gravité de ces événements », mais prétend que ces situations sont « tout de même relativement peu fréquentes » compte tenu du nombre élevé de personnes incarcérées. Il souligne en outre que le travail des agents des services correctionnels « implique parfois la réalisation d’interventions physiques ».