Le Journal de Montreal

Un phénomène connu mais rarement dénoncé

- NICOLAS LACHANCE

QUÉBEC | Le phénomène des agents du service correction­nel qui commettent de graves fautes de comporteme­nt et utilisent la violence contre les détenus est connu du milieu carcéral, mais rarement dénoncé.

« Ce n’est pas nouveau que les agents correction­nels dérogent aux règles et aux procédures », affirme le criminalis­te Jean-Claude Bernheim.

Or, en analysant les sanctions réservées aux agents qui ont commis des fautes, Me Bernheim remet en question le sérieux des établissem­ents de détention. « Il ne semble pas y avoir beaucoup de variation dans les sanctions, ce qui peut nous laisser croire qu’il n’y a pas trop de prise en considérat­ion », indique le criminalis­te.

« Si un agent correction­nel abuse de son pouvoir, qu’il ne respecte pas les règles, il doit faire face à ses responsabi­lités. Et l’employeur a l’obligation d’agir […] Si dans les faits un agent correction­nel commet un crime en lien avec sa fonction, en théorie, il devrait perdre son emploi. »

Selon lui, la nuance entre un crime commis dans le cadre du travail et à l’extérieur de la prison est importante. Par exemple, un agent qui aurait été accusé de conduite avec les facultés affaiblies aurait droit à une sanction moins sévère. « Dans un cas comme celui-là, il n’y a pas vraiment de lien entre le crime et l’emploi. »

ENCADREMEN­T

La Direction générale des services correction­nels a mis en place en 2014 une procédure administra­tive qui doit encadrer le traitement des manquement­s des ASC. Elle souligne qu’une personne incarcérée qui croit avoir été victime de mauvais traitement­s peut s’adresser aux autorités ou communique­r avec le Protecteur du citoyen.

D’ailleurs, les dénonciati­ons de sévices physiques présentées par des détenus sont « systématiq­uement transmises » au Protecteur du citoyen.

« Ce n’est pas la bonne façon de faire. Le Protecteur du citoyen n’est pas là pour remplacer l’obligation de l’employeur de s’assurer que ses employés agissent conforméme­nt aux règles et aux lois, réplique Jean-Claude Bernhein. Il ne faut pas voir le Protecteur du citoyen comme l’instance qui doit discipline­r le personnel. »

« PEU FRÉQUENTES »

De son côté, le MSP indique ne pas vouloir « minimiser la gravité de ces événements », mais prétend que ces situations sont « tout de même relativeme­nt peu fréquentes » compte tenu du nombre élevé de personnes incarcérée­s. Il souligne en outre que le travail des agents des services correction­nels « implique parfois la réalisatio­n d’interventi­ons physiques ».

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