Le Journal de Montreal

Québec a une clause pour résilier le contrat du CUSM

L’entente peut être annulée en cas d’actes interdits comme ceux qui ont été commis

- ÉRIC YVAN LEMAY

Québec aurait la possibilit­é de profiter de la condamnati­on d’un ancien directeur du CUSM pour résilier le contrat en partenaria­t public-privé qui doit durer jusqu’en 2044.

Lundi, Yanaï Elbaz, ex-directeur général associé au Centre universita­ire de santé McGill (CUSM), a plaidé coupable d’avoir accepté 10 millions $ de SNC-Lavalin dans le cadre de la constructi­on du campus Glen, achevée en 2014. Elbaz a manoeuvré pour favoriser cette firme au détriment de l’autre consortium en lice pour l’obtention du contrat en PPP.

Hier, les avocats du CUSM ont soutenu avoir payé 20 % trop cher pour ce contrat à cause des magouilles, soit 934 millions $ (voir autre texte).

En scrutant le volumineux contrat signé entre le CUSM et SNC-Lavalin, on constate la présence d’une clause permettant sa résiliatio­n en cas d’actes interdits.

Ces actes interdits comprennen­t entre autres le fait de « donner ou s’engager à donner [...] un cadeau ou une contrepart­ie de quelque nature que ce soit » en échange de l’obtention du contrat.

C’est précisémen­t le stratagème qui a été décrit en cour dans le cas de Yanaï Elbaz.

LES MAINS LIÉES

En entrevue à QUB radio, hier, la ministre de la Santé, Danielle McCann, a pourtant dit qu’elle avait les mains liées et qu’elle ne rouvrirait pas l’entente de partenaria­t.

« Il faut qu’on respecte le contrat qui a été signé, et on en a pour 25 ans », a-t-elle dit.

Elle réagissait au reportage de notre Bureau d’enquête sur le fait que Québec a voulu garder secrète une partie de l’entente qui garantit jusqu’à 26 % de profits et de frais de gestion aux partenaire­s privés responsabl­es des travaux de rénovation au Centre hospitalie­r de l’Université de Montréal et au CUSM. Au CUSM, les Québécois ont notamment payé plus de 8000 $ pour deux prises électrique­s et environ 35 000 $ pour réaménager le bureau du directeur général.

Le président de la Fédération de la santé et des services sociaux, Jeff Begley, invite la ministre à envisager la résiliatio­n.

« On ne comprend pas sa réticence à utiliser tous les moyens pour y mettre fin. La solution, c’est de racheter le contrat, un contrat où il y a eu de la fraude et où on n’a pas respecté les règles », dit-il.

UNE DETTE DE 840 M$

La résiliatio­n du contrat ne serait toutefois pas sans frais. Le CUSM devrait notamment racheter la dette contractée par le consortium dirigé par SNC-Lavalin pour construire l’hôpital.

Selon les états financiers de l’hôpital, la dette actuelle envers son partenaire privé s’élève à 840 M$. Le CUSM doit rembourser cette dette à raison de 4,4 millions $ par mois jusqu’en 2044.

En France, le Centre Hospitalie­r Sud Francilien a mis fin à son PPP en 2014, moyennant une pénalité de 80 millions d’euros. L’hôpital a aussi repris à sa charge les coûts de constructi­on de 344 millions d’euros. Malgré tout, on estimait épargner 900 M$ sur la durée totale de l’entente.

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PHOTO D’ARCHIVES, PIERRE-PAUL POULIN Le consortium dirigé par SNC-Lavalin a décroché le contrat du CUSM en 2010 après des pots-de-vin versés à deux ex-dirigeants de l’hôpital. Le coût de la constructi­on et de l’entretien sur une durée de 30 ans s’élève à plus de quatre milliards de dollars.
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DANIELLE MCCANN Ministre de la Santé

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