Le Journal de Montreal

Je pleure un père qui ne m’a pas aimé

Comment aider mes enfants?

- LOUISE DESCHÂTELE­TS louise.deschatele­ts@quebecorme­dia.com

Je m’adresse à Stéphane qui ne comprend pas pourquoi la douleur d’avoir perdu son père est plus grande que ce à quoi il s’attendait, alors qu’il n’avait jamais eu une bonne relation avec lui, encore moins quand il avait appris son homosexual­ité.

« Mon cher Stéphane, Louise vous a donné son avis, voici le mien. Comme vous dites dans la première partie de votre lettre que vous étiez plus porté vers les arts alors que votre père l’était plus vers le sport et les sciences, est-il possible que vous pleuriez beaucoup plus le père que vous n’avez pas eu et dont vous auriez eu besoin, que le vrai père que vous avez eu?

Vous me semblez d’une intelligen­ce et d’une sensibilit­é supérieure­s à la moyenne. En était-il de même pour votre père? Ou, en toute honnêteté, n’était-il pas un peu moron sur les bords? Combien de fois a-t-il raté l’occasion de vous aider, de vous encourager, de s’intéresser à vous, d’être capable d’apprécier vos qualités, vos talents, d’apporter le petit coup de pouce qui vous manquait pour atteindre votre but?

Dans la vie, quand le fils ou la fille est plus intelligen­t, plus sensible que le père, la mère ou les deux, cela ne donne pas des résultats extraordin­aires. Je vous conseille de vous laisser aller à votre peine qui finira par passer. Si vous refoulez votre tristesse, elle va durer encore plus longtemps et vous nuira pendant plus de temps. Après, il vous restera à accepter que votre père n’a pas été à la hauteur pour élever un fils comme vous.

Je ne crois pas que votre orientatio­n sexuelle ait grand chose à voir là-dedans. À partir du moment où vous ne correspond­iez pas au cadeau qu’il avait commandé dans le catalogue, il n’a pas été capable de s’en remettre. Comme avant, il va vous falloir faire sans lui, et c’est tout.

Remarquez qu’il devait y avoir dans sa vie pas mal d’autres choses qu’il avait de la difficulté à accepter. C’est probableme­nt l’ensemble de tout ça qui a causé sa mort prématurée d’une attaque cardiaque. La vie, c’est une aventure dont il faut accepter les aléas si on veut continuer le périple. Sinon, la vague nous tasse sur le côté alors que d’autres prennent la même vague pour se projeter plus loin.»

Anonyme

En dépit des différence­s d’analyse qu’on peut faire de ce cas vous et moi, l’important est de donner à ce garçon le maximum d’avenues pour scruter son chagrin et trouver les moyens d’en ressortir grandi et avec le minimum de séquelles. Ce passé qui fut si difficile à vivre et qui lui remonte dans la gorge à l’occasion du décès de son père ne doit en rien l’empêcher de tracer bellement son avenir.

Mon conjoint est propriétai­re d’un camion et fait du transport entre le Canada et les États-Unis. Quand mes deux enfants étaient bébés, ils ne se rendaient pas trop compte des absences de leur père. Entre ma présence, celle de ma mère et celle de leur gardienne, ils trouvaient suffisamme­nt de bras aimants autour, pour les combler. Mais depuis qu’ils sont à tous deux à l’école primaire, on dirait qu’ils ressentent le manque de leur père encore plus fortement qu’avant. Auriez-vous quelques conseils à me donner pour qu’ils vivent ses absences plus facilement?

Une maman qui souhaite combler le manque

Pourquoi ne pas leur montrer sur Internet une carte du Canada et des USA et leur indiquer chaque soir où leur père se trouve. Je ne sais si vous le faites, mais le rituel d’appeler ce dernier chaque soir pour qu’ils entendent sa voix serait aussi une bonne idée. Faites également attention vous-même à ne pas vous plaindre de l’absence de votre conjoint, car c’est très contaminan­t pour les enfants.

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