Le Journal de Montreal

Il a servi de la bière durant 45 ans

Le barman a notamment déjà empêché une tentative de meurtre en calmant un homme armé d’un fusil

- ALEX DROUIN

SHERBROOKE | Un barman de l’Estrie vient de servir sa dernière bière après avoir été derrière un bar pendant 45 ans. Son souvenir le plus marquant est d’avoir empêché une tentative de meurtre.

Mario Lauzon, 65 ans, a commencé sa carrière de barman en 1973, alors qu’il n’avait que 20 ans. À l’époque, un verre de bière de 12 onces se vendait 85 cents. Aujourd’hui, la facture pour cette même quantité de boisson peut grimper jusqu’à six dollars.

Il a appris son métier sur le tas et a rapidement dû apprendre à se battre avec des ivrognes afin de rétablir le calme. Il n’a pourtant jamais aimé la violence.

M.Lauzon est reconnu dans le milieu comme étant un barman souriant et chaleureux.

FUSIL

Un soir, au début des années 1970, une altercatio­n a éclaté entre deux clients et l’un d’eux a sorti un couteau pour se défendre. L’autre homme a pris la fuite. Il est toutefois revenu quelques minutes plus tard avec un fusil.

Le barman, qui mesure seulement 5 pieds 6 pouces, n’a eu d’autre choix que de s’interposer pour tenter de calmer l’homme armé.

« Je le connaissai­s, alors je lui ai parlé pour le calmer et l’avertir que la police était sur le point d’arriver », se remémore le sexagénair­e, qui a travaillé à la Taverne Alexandre au cours des 15 dernières années.

FEMMES DANS LES TAVERNES

C’était aussi l’époque où les femmes n’étaient pas toujours les bienvenues dans les tavernes et les bars. M. Lauzon ne compte plus les fois où il a dû remettre à sa place un client qui était parfois trop insistant envers une dame. Marié depuis maintenant 43 ans et père de deux enfants, il n’a jamais toléré qu’on manque de respect.

« C’était une autre époque dont je ne m’ennuie pas », dit-il sans détour.

Sa longue carrière l’a aussi amené à travailler dans les bars et les discothèqu­es.

Comme dans la pièce de théâtre Broue, M. Lauzon a vu défiler au fil des années quelques clients originaux, comme celui qui alignait des Jelly Beans devant lui avant de boire sa bière.

Certes, M. Lauzon a appris à se battre, mais il a aussi appris à écouter les clients qui se confiaient à lui.

« Je devais parfois user de psychologi­e », a relaté celui qui est devenu barman alors qu’il se cherchait un travail pendant l’hiver, puisqu’il était employé dans la constructi­on pendant l’été et qu’il était au chômage.

FIERTÉ

Il préfère garder pour lui les histoires touchantes que lui ont confiées les nombreux clients qu’il a croisés sur sa route.

« L’une de mes plus grandes fiertés était de voir certains clients me présenter leur enfant et me dire de prendre soin de leur progénitur­e comme je l’avais fait avec eux », dit-il humblement.

Celui qui a passé 45 ans à servir de la bière a exprimé son questionne­ment quant au mot « barman », dont la définition a changé au fil des années.

« Aujourd’hui, on appelle ça mixologue, alors qu’on mélange les mêmes affaires qu’il y a 40 ans, mais avec des épices », a-t-il lancé avec humour.

Il a également vu l’apparition des bières de microbrass­eries.

« Aujourd’hui, la clientèle est plus sélective et recherche des bières de dégustatio­n », a-t-il constaté.

À la retraite depuis deux semaines, M. Lauzon a mentionné qu’il allait s’ennuyer du contact avec les clients.

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PHOTO COLLABORAT­ION SPÉCIALE, ALEX DROUIN Mario Lauzon a terminé sa carrière à la Taverne Alexandre de Sherbrooke, vendredi dernier, après avoir passé 45 ans derrière un comptoir à servir de la bière.

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