EN PRISON AVEC SES SECRETS
Le « pilote des stars », qui a plongé 180 000 clients d’Hydro-Québec dans le noir, écope sept ans de prison
Le public ne saura jamais comment celui qu’on surnommait le pilote des stars a saboté le réseau d’Hydro-Québec.
Un juge vient de condamner l’ancien « pilote des stars » Normand Dubé à sept ans de prison pour avoir saboté trois lignes à haute tension dans les Laurentides, mais le public ne saura jamais comment il s’y est pris.
En vertu d’une ordonnance fédérale destinée à protéger la sécurité nationale, son procès sera demeuré presque secret jusqu’au bout, et la preuve détaillée le restera.
Les médias ne peuvent pas rapporter la technique que Dubé a utilisée pour provoquer des pannes sur les lignes d’Hydro-Québec, le 4 décembre 2014.
« C’est important que le modus operandi demeure confidentiel pour une question de sécurité nationale », a affirmé le procureur Alexis Marcotte-Bélanger hier en mêlée de presse.
En fait, même les procureurs au dossier et le juge ignorent comment il s’y est pris précisément, selon les transcriptions caviardées du procès, qui s’est déroulé la plupart du temps à huis clos.
Au cours des audiences, le ministère public a bien affirmé qu’il avait utilisé certains objets pour attaquer les lignes d’Hydro-Québec depuis son petit avion. Il n’a cependant pas pu dire exactement s’il avait agi seul ou avec des complices, ou même décrire ses manipulations précises pour provoquer les pannes.
EN APPEL DÈS JEUDI
Le nouvel avocat de Dubé, Mario Lavigne, a annoncé qu’il contestera la peine imposée à son client en Cour d’appel dès jeudi.
Il tentera aussi de le faire libérer sous caution, mais le ministère public devrait s’y opposer.
« On va contester, parce que l’intérêt public ne commande pas une remise en liberté », dit le procureur Steve Baribeau.
Pour la juge à la retraite Nicole Gibeault, la sentence de sept ans est lourde, mais « elle se devait de l’être ».
« Ça représente bien tout le poids des dommages qui auraient pu être causés, dit-elle. Nous sommes très chanceux qu’il n’y ait pas eu de désastre, qu’on n’ait pas entendu parler d’un malade resté seul à la maison avec son respirateur électrique en panne ! »
Le criminaliste Jean-Claude Hébert souligne de son côté le caractère inédit du crime qu’a commis Dubé. « Des précédents, il n’y en avait pas beaucoup, s’il y en avait ! »
Le juge Paul Chevalier a surtout retenu des facteurs aggravants contre Dubé, dont son mobile de vengeance, tout comme « le nombre de foyers touchés et les pertes financières directes et indirectes subies par Hydro-Québec ».
ENCORE TROIS PROCÈS
En plus de l’appel sur la peine d’hier et son verdict de culpabilité pour l’attaque sur les lignes électriques, Dubé subira aussi un procès pour 20 chefs d’accusation d’incendies criminels, méfaits, menaces de causer la mort ou des blessures et harcèlement criminel, dans d’autres dossiers.
Il fait aussi face à une poursuite civile d’Hydro-Québec, qui lui réclame près de 30 M$ pour les dommages qu’il a causés sur son réseau. Les méfaits de l’ancien « pilote des stars » ont notamment empêché la société d’État de livrer quelque 4000 mégawatts d’exportations planifiées.