Merci aussi au « pétrole sale »
Grâce à « l’énergie sale » des provinces productrices de pétrole, le gouvernement Legault va empocher l’an prochain 13,1 milliards de dollars de péréquation, soit les deux tiers (66,2 %) de l’enveloppe totale de la péréquation que le gouvernement Trudeau versera à l’ensemble des provinces.
Du jamais-vu ! C’est 1,4 milliard de dollars de plus que cette année. Rien de moins que 5,3 milliards de dollars de plus qu’en 2013-14 alors que le Québec « n’encaissait » à l’époque que 48,6 % de l’ensemble de la péréquation fédérale.
Mais quel paradoxe de voir le Québec se retrouver encore plus « accroc » à la péréquation fédérale alors que François Legault critiquait vertement le gouvernement Couillard pour sa « dépendance » envers ladite péréquation !
Un gouvernement de la CAQ, disait-il à Philippe Couillard, « va viser la péréquation zéro » en éliminant l’écart de richesse avec le reste du Canada.
Après lui avoir rappelé dans une récente chronique que « son » élimination de la péréquation me semblait utopique (puisque cela nécessiterait une hausse du PIB québécois de 16,8 % du jour au lendemain), son bureau m’avait répondu : « M. François Legault a toujours affirmé que la péréquation zéro, c’est un objectif à long terme. Évidemment, ça ne se fera pas au cours d’un seul mandat. La péréquation zéro, c’est le défi du Québec pour les 15 à 20 prochaines années. »
À vrai dire, je ne vois pas comment le Québec pourrait se passer de la manne de la péréquation fédérale. Sans elle, on serait grandement dans le trou.
NOTRE PAUVRETÉ
Si on reçoit de la péréquation, c’est parce que le Québec, en vertu des savants calculs de péréquation, fait partie des cinq provinces pauvres : Îledu-Prince-Édouard, Nouvelle-Écosse, Nouveau-Brunswick, Manitoba, Québec.
La péréquation est un programme fédéral de transfert d’argent aux provinces qui sont qualifiées de « moins riches » que la moyenne canadienne.
NOS INDICES DE PAUVRETÉ ?
En termes de revenu disponible (après impôts et cotisations sociales), le Québec arrive à la queue, avec son maigre revenu de 28 785 $ par habitant, soit 4548 $ de moins que dans le reste du Canada.
Concernant le PIB par habitant, le Québec arrive au 7e rang sur 10, avec un montant 50 276 $.
Notre productivité accuse ainsi un recul de 10 638 $ sur le PIB par habitant dans le reste du pays.
LA COLÈRE DE L’OUEST
De toutes les provinces, c’est cependant le Québec qui présente la meilleure fiche budgétaire, ayant déclaré d’imposants surplus au fil des dernières années.
Pendant ce temps-là, avec la chute du prix du baril de pétrole, les trois provinces pétrolières (Alberta, Saskatchewan, Terre-Neuve-Labrador) se retrouvent en déficit budgétaire.
Mais en vertu des calculs de la péréquation fédérale, elles restent « riches » au point où elles n’ont droit à aucune somme d’argent à ce titre. La production de pétrole permet à ces trois provinces de bénéficier d’un PIB par habitant allant de 24 à 56 % plus élevé qu’au Québec.
Et c’est en raison notamment de cet écart de richesse attribuable au pétrole de l’Ouest canadien, qualifié « d’énergie sale » par François Legault, que le Québec est financièrement favorisé par le calcul de la péréquation.
Quand François Legault a apposé la semaine dernière une fin de non-recevoir à la construction d’un nouveau pipeline qui traverserait le territoire québécois pour transporter le pétrole de l’Ouest jusqu’au Nouveau-Brunswick, la frustration des premiers ministres de l’Ouest canadien a grimpé d’un autre cran.
Ils se sentent grandement floués par le programme de la péréquation.
Ils sont d’autant plus frustrés de voir le gouvernement Legault essayer de vendre son « énergie propre » aux provinces alors qu’il empoche 13 milliards de dollars grâce à leur pétrole qu’il qualifie d’énergie de sale.