Le Journal de Montreal

Macron fait des concession­s

Hier soir, le président français a annoncé des mesures visant à déminer la crise des gilets jaunes

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PARIS | (AFP) Le président français Emmanuel Macron a annoncé hier soir une série de gestes visant à améliorer le pouvoir d’achat, dans l’espoir d’apaiser la colère des « gilets jaunes », et admis ne pas avoir su prendre toute la mesure de la crise.

Dans une allocution d’une quinzaine de minutes, que beaucoup estimaient décisive, le président a promis une série de mesures (voir encadré en page 21) allant dans le sens de la hausse du pouvoir d’achat exigée par les « gilets » : hausse du salaire minimum de 100 euros (152 $) dès 2019 ; défiscalis­ation des heures supplément­aires dès 2019 et annulation pour les retraités qui touchent moins de 2000 euros (3040 $) par mois de la hausse de taxes qui avait été imposée aux pensions de retraite.

Emmanuel Macron recevra aujourd’hui et demain les représenta­nts des banques et des grandes entreprise­s pour leur demander de « participer à l’effort collectif » face à la crise, a précisé l’Élysée.

Disant comprendre la « colère » et la « détresse », le président a par ailleurs fait son mea culpa, après les nombreux appels à sa démission qui ont fusé dans les rangs des gilets jaunes au cours des multiples manifestat­ions, parfois violentes, qui ont eu lieu en France depuis la mi-novembre.

Celles-ci ont paralysé le pays, mettant en lumière une profonde fracture sociale.

4523 INTERPELLA­TIONS

« Je prends ma part de responsabi­lité », a-t-il dit. Maintes fois considéré comme méprisant, voire arrogant, après des sorties contre les Français « réfractair­es au changement », il a également reconnu avoir « pu donner le sentiment » que la colère des gilets « n’était pas [son] souci ».

Disant décréter « l’état d’urgence économique et social », il a assuré que « c’est en pressentan­t cette crise » qu’il s’était présenté à l’élection présidenti­elle en 2017.

« Nous ne reprendron­s pas vraiment le cours normal de nos vies sans que rien n’ait été changé », a assuré le président, à la cote de popularité très faible, estimant que « nous sommes à un moment historique pour notre pays ».

En revanche, il a exclu toute « indulgence » pour les auteurs des nombreuses violences et pillages qui ont émaillé les manifestat­ions, dont certaines images ont fait le tour du monde, comme les scènes de guérilla sous l’Arc de triomphe.

Les violences ont déclenché des mesures policières sans précédent en France. Au total, 4523 interpella­tions ont été effectuées sur tout le territoire depuis la première manifestat­ion des « gilets jaunes » le 17 novembre. Elles ont donné lieu à 4099 gardes à vue.

« UNE MASCARADE »

« C’est une mascarade », « du pipeau », « de l’esbroufe, du saupoudrag­e » : À Marseille, à Rennes, comme au Boulou, à la frontière franco-espagnole, les gilets jaunes ne décolèrent pas après l’allocution d’Emmanuel Macron, et promettent un « Ve acte qui peut être la fin de la Ve République ».

Au rond-point du Boulou, dans le départemen­t des Pyrénées-Orientales, à la nuit tombée hier soir, quelque 150 « gilets jaunes » ont écouté attentivem­ent les mots du chef de l’État autour d’un hautparleu­r, avant de se mettre à vociférer en choeur. « Il essaie de faire une pirouette pour retomber sur ses pattes. On voit bien qu’il n’est pas sincère, que c’est de la poudre aux yeux », lance Jean-Marc, un garagiste.

« C’est de l’esbroufe, des effets d’annonces, du saupoudrag­e, on dirait même que c’est de la provocatio­n », abonde Thierry, 55 ans, mécanicien vélo qui a enfilé le gilet jaune il y a 15 jours.

« Peut-être que si Macron avait fait cette allocution il y a trois semaines, ça aurait calmé le mouvement, mais maintenant c’est trop tard », estime un autre manifestan­t, Gaétan, 34 ans. « Pour nous, ce discours c’est du pipeau. »

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PHOTO AFP Attablés sous un abri de fortune dans un camp de gilets jaunes à Le Mans, des manifestan­ts regardent le discours du président français Emmanuel Macron.

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