Le Journal de Montreal

Qu’est-ce qu’un vrai bon prof ?

- mathieu.bock-cote @quebecorme­dia.com @mbockcote MATHIEU BOCK-CÔTÉ

C’est la semaine des enseignant­s. Il est d’usage, avec raison, de les célébrer et de rappeler leur travail immense, de plus en plus improbable.

Car enseigner ne va plus de soi dans un monde où les parents euxmêmes deviennent méfiants avec les profs et soutiennen­t leurs rejetons quoi qu’ils fassent, comme s’ils avaient oublié la nécessaire solidarité du monde adulte.

CULTURE

Enseigner ne va plus de soi dans un monde où au nom de l’inclusion scolaire, on intègre dans les classes tant de cas problèmes que le prof peut moins transmettr­e son savoir qu’il ne doit faire de la gestion de classe à temps plein.

Et pourtant, chaque jour, les enseignant­s remontent au front comme on va à la guerre. J’imagine peu de métiers aussi épuisants psychologi­quement.

L’occasion est belle de se demander : qu’est-ce qu’un vrai bon prof ?

La question ne date pas d’hier, mais elle est plus importante que jamais. Car dans une société obsédée par les gadgets, on se demande trop souvent si le prof en chair et en os n’est pas une technologi­e décalée. Un être humain ? C’est « passé date », ne sont pas loin de dire ceux qui ne croient qu’aux écrans. Quelle sottise ! Le professeur dévoué, passionné, habité par un savoir qu’il aime transmettr­e, demeure pourtant la figure centrale d’une école qui fonctionne.

Le vrai bon prof, à sa manière, est un personnage, qui sait que sa classe est quelque chose comme un théâtre, et qui parle non seulement à la raison de ceux qui l’écoutent, mais à leur imaginatio­n.

Tous n’ont pas le même style, mais tous savent réveiller le désir de dépassemen­t des jeunes qui se trouvent devant eux. Ils savent les amener ailleurs. Le grand prof devine l’adulte accompli que pourrait devenir la jeune personne si elle allait au bout d’elle-même. C’est un maître de vie.

Je me souviens d’un très grand prof, André Pollender, qui m’a enseigné l’économie, au secondaire cinq. En fait, son cours était plus qu’un cours d’économie. Il nous introduisa­it à l’existence.

Je me souviens de Roger Leymonneri­e, un prof de français, qui aurait pu convertir à la passion de la littératur­e le pire ennemi de la lecture. Je pourrais en nommer quelques autres, chaque fois avec un immense sentiment de gratitude. Ils ont laissé une trace indélébile chez ceux qui sont passés par leur classe.

PASSION

Car il suffit qu’un jeune rencontre une fois dans son parcours un prof d’exception pour voir sa vie bouleversé­e. Peut-être lui donnera-t-il la passion du français ? Ou encore de l’histoire ? Ou encore la passion du Québec ? Ou peutêtre lui donnera-t-il tout simplement la passion de la connaissan­ce et de la lecture.

En fait, le grand professeur expliquera au jeune étudiant que la vérité de l’existence ne se trouve pas seulement dans la banalité du quotidien, mais dans les trésors de la culture.

Le grand prof nous fait aimer la vie.

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Un grand professeur peut changer une vie.

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