Le Journal de Montreal

Le meilleur thriller en ville

- SOPHIE DUROCHER sophie.durocher @quebecorme­dia.com

On a de bons scénariste­s au Québec. Luc Dionne qui fracasse des records avec District 31, Michelle Allen qui nous a ébranlés avec Fugueuse.

Mais même les meilleurs scénariste­s en ville ont de la compétitio­n : le meilleur thriller sur nos écrans en ce moment, qui nous tient sur le bout de nos sièges, ce n’est pas une fiction. C’est un grand reportage captivant qui m’a tenue en haleine pendant une heure : Lepilotede­sstars, que j’ai dévoré hier sur club illico.

Quand on dit que la réalité dépasse la fiction…

LE QUÉBEC DANS LE NOIR

Même le scénariste le plus flyé n’aurait pas pu écrire une histoire plus mystérieus­e, pleine de rebondisse­ments, que celle de Normand Dubé, qui a été trouvé coupable d’avoir saboté des lignes de haute tension avec son petit avion le 4 décembre 2014, causant une panne majeure qui a touché 180 000 résidences et coûté 30 millions de dollars à HydroQuébe­c.

C’est qu’au coeur de ce premier grand reportage du Bureau d’enquête, il y a un mystère enveloppé dans une énigme. Aucun intervenan­t, aucun journalist­e n’a le droit de nous dire, en public ou en privé, de quelle manière Normand Dubé s’y serait pris pour attaquer les lignes électrique­s ! S’ils parlent, ils sont passibles d’accusation­s d’outrage au tribunal.

Hier, à QUB radio, j’ai interviewé la journalist­e MarieChris­tine Noël et la réalisatri­ce Ninon Pednault. Elles ont été catégoriqu­es : pas question de me donner le moindre indice qui me permettrai­t de savoir comment Dubé s’y est pris, c’est une question de sécurité nationale. J’avais l’impression de parler à des agents de la CIA qui, dans les films, glissent à l’oreille des personnes qui posent trop de questions : « On pourrait te le dire, mais après on devrait te tuer ».

En visionnant Lepilotede­sstars , j’ai eu l’impression de suivre un thriller à la John Le Carré. Pendant une heure, je me suis amusée à essayer de mettre ensemble les morceaux du casse-tête.

Sauf que toutes les cinq minutes, je changeais d’avis : « C’est sûr que c’est lui », « Ça ne peut pas être lui », « Bien oui, il l’a fait », « Bien non, ils n’ont pas de preuve hors de tout doute », « Oui, mais il n’y a que lui qui aurait pu être le coupable »… Bref, j’étais aussi accro que lors des meilleurs épisodes de District 31 ou de Blue Moon.

Quand une histoire semblable a autant de ramificati­ons, de points d’interrogat­ion sans réponse, le défi c’est de bien raconter l’histoire, sans que le public se sente perdu dans les détails. Heureuseme­nt que Le pilote des stars ne lésine pas sur les graphismes et les dessins pour imager ce dossier complexe.

QUI DIT VRAI ?

Un autre procès de Normand Dubé (pour incendies criminels, menaces et harcèlemen­t criminel) débute la semaine prochaine, et je vais le suivre avec attention.

Dans Le pilote des stars, on entend des enregistre­ments dans lesquels Dubé profère des menaces contre des fonctionna­ires. Et quand il lance « La vengeance est un plat qui se mange froid », ça nous glace le sang.

Je vous l’ai dit, toute cette histoire est digne d’un John Le Carré…

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