Le Journal de Montreal

18 000 rêves brisés

Le Journal a reçu plus d’une centaine de courriels de partout dans le monde

- ANTOINE LACROIX

Luc Lapointe attendait qu’un travailleu­r français vienne prêter main-forte dans sa forge. Mais son dossier a été éliminé par le gouverneme­nt, comme ceux de milliers de personnes qui voient leur rêve de travailler au Québec s’éloigner.

« Injuste », « décevant », « inacceptab­le ». La décision du gouverneme­nt Legault d’annuler 18 000 dossiers d’immigratio­n non traités comme le prévoit un projet de loi déçoit tant des entreprene­urs québécois que des immigrants en attente d’une réponse.

Le Journal a reçu plus d’une centaine de courriels de gens de partout sur la planète, furieux et déçus, qui attendaien­t une réponse, parfois depuis des années (voir en pages 6 et 7).

Plusieurs disent que leur rêve est « brisé ». Des Québécois ont aussi dénoncé la situation.

« Ça se dit un gouverneme­nt d’entreprene­urs, mais ils viennent directemen­t nous pénaliser. C’est clair que plusieurs entreprise­s voulaient engager des gens parmi les 18 000. De mon côté, je parrainais depuis un an un Français pour qu’il vienne travailler pour moi », déplore Luc Lapointe, fondateur de Forges Urbaines, la plus grande entreprise de savoir-faire artisanale au Canada avec un chiffre d’affaires de 2 millions $.

Le ministre de l’Immigratio­n, Simon Jolin-Barrette, a présenté la semaine dernière le projet de loi 9, qui permettra notamment à Québec d’« imposer des conditions qui affectent la résidence permanente » conférée en vertu de la loi fédérale sur l’immigratio­n.

RECOMMENCE­R À ZÉRO

Le gouverneme­nt Legault prévoit ainsi mieux arrimer les travailleu­rs qualifiés avec les besoins des compagnies.

Si M. Lapointe estime que le nouveau plan d’immigratio­n des caquistes « sera une bonne chose et bien plus efficace », il aurait souhaité que l’on poursuive le traitement des demandes déjà formulées afin d’éviter que « tout le monde doive recommence­r à zéro ».

« Ce sont des coûts et du temps qui sont perdus à jamais, il me semble qu’il y avait d’autres solutions », se questionne le forgeron, qui a démarré son entreprise en 2007.

Le forgeron français parrainé par Luc Lapointe, Olivier Sechet, est destiné à devenir directeur de production chez

Forges Urbaines, dès que sa demande d’immigratio­n sera acceptée (voir autre texte).

« Tout est prêt pour l’accueillir, on a augmenté la charge de travail pour compenser son salaire, on a investi pour du matériel informatiq­ue. Ne reste plus qu’à ce qu’il arrive », grogne M. Lapointe.

EMPLOI ASSURÉ

Le Français de 42 ans possède une « expérience très pertinente et pointue dans le domaine du fer forgé et de la métallerie fine », qui est très rare au Québec.

« Ce n’est pas comme s’il arrivait ici avec rien. Il a un emploi assuré, fait valoir M. Lapointe. Le gouverneme­nt devrait plutôt faciliter l’arrivée de gens comme lui, qui va venir aider une entreprise d’ici à grandir. Son absence vient affecter mon seuil de rentabilit­é », s’inquiète le forgeron.

Il en coûtera environ 19 M$ à Québec pour rembourser les frais des demandeurs. Le gouverneme­nt Legault invite les gens à recommence­r à zéro et à s’inscrire au programme Arrima en déposant gratuiteme­nt une déclaratio­n d’intérêts.

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PHOTO AGENCE QMI, JOËL LEMAY Luc Lapointe, qui travaille dans son atelier de Forges Urbaines, une entreprise située en plein coeur de l’arrondisse­ment de Saint-Léonard à Montréal, attend depuis un an un Français afin qu’il puisse lui donner un coup de main.

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