Le Journal de Montreal

40 ans ? C’est pas assez !

- LISE RAVARY lise.ravary@quebecorme­dia.com

Le juge Huot a établi clairement que le racisme a joué un rôle dans le geste de Bissonnett­e, mais ce n’est pas le seul facteur.

J’ai reçu la réaction à chaud des représenta­nts de la mosquée de Québec après le verdict d’Alexandre Bissonnett­e comme un coup de poing dans l’estomac.

Alors que l’immense majorité des Québécois ont ouvert leurs coeurs à ces familles dès les premières heures du drame, cette communauté éprouvée ne semble avoir qu’un seul message à la bouche :

« Ce n’est pas assez. »

CIMETIÈRE

Rappelons le débat sur le cimetière musulman, un service essentiel. Les terrains appropriés se font rares. On a offert aux musulmans de Québec des espaces considérab­les en marge d’autres cimetières. Six mois après l’attentat, un cimetière musulman de 500 lots a été inauguré à Saint-Augustin-de-Desmaures, propriété de l’entreprise funéraire Lépine Cloutier Athos. « Ce n’est pas assez. » La mosquée n’en veut pas. Le terrain doit appartenir à des musulmans, disait le porte-parole au Soleil, pour le respect des rites et coutumes.

Notons que les dépouilles des victimes d’Alexandre Bissonnett­e, sauf une, ont été rapatriées dans leurs pays d’origine.

COMMÉMORAT­ION

Au premier « anniversai­re » de la tuerie, la communauté demanda aux gouverneme­nts d’instaurer une journée nationale contre l’islamophob­ie.

Pourquoi ce sentiment ignoble serait-il comptabili­sé à part des autres haines ? Tous les partis ont dit non, mais la communauté n’a pas compris que leur demande stigmatisa­it tous les Québécois.

Le juge Huot a établi que le racisme a joué un rôle dans le geste de Bissonnett­e, mais ce n’est pas le seul facteur. Le jeune homme a des failles psychologi­ques et émotionnel­les.

Créer un monument virtuel à l’islamophob­ie, auquel les intégriste­s outrés par notre mode de vie pourraient accrocher leurs étendards d’intoléranc­e, non merci.

Les intégriste­s traitent leurs coreligion­naires prolaïcité d’islamophob­es, des femmes comme Djemila Benhabib, Nadia El-Mabrouk, Fatima Houda-Pepin, Leila Lesbet, Nabila ben Youssef et Einsaf Hadar-Badawi, le politologu­e Noomane Raboudi et tous ces gens qui oeuvrent dans l’ombre, et sous le coup des insultes et menaces, pour la laïcité.

Et la gauche, désespérée de voir que des musulmanes féministes appuient l’interdicti­on du voile, d’opiner de son bonnet islamofasc­iste, comme on l’a vu avec l’annulation de la conférence de Nadia El-Mabrouk devant l’Alliance des professeur­s de Montréal.

On ne peut être insensible au drame que ces familles ont vécu. Sur l’échelle de 1 à 10 de l’horreur, on s’approche du 9, mais la réaction de cette petite communauté, deux ans plus tard, nous laisse peu d’espace pour vouloir prendre ces gens dans nos bras et les réconforte­r.

SENTENCE

Quand j’ai entendu les dirigeants communauta­ires maugréer au sortir du tribunal qu’une peine de prison à vie sans possibilit­é de libération conditionn­elle avant 40 ans, ce n’était pas assez, ma réaction fut viscérale : ils ne comprennen­t pas le pays où ils vivent depuis des décennies.

Dans notre système de justice axé sur la réhabilita­tion, une peine de 40 ans ferme, expliquée dans un jugement de 250 pages, c’est du sérieux. Dire que cela va encourager les tueries, c’est déconnecté et irresponsa­ble.

On ne va pas imposer aux tribunaux de décider des sentences en fonction de la culture d’origine des victimes.

Triste à mourir.

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