De l’égalité juridique à l’égalité réelle
Une fois de plus, le débat sur l’immigration et la laïcité est mal parti. Il nous apportera sûrement son lot d’amalgames et d’invectives entre ceux qui prétendent que les Québécois sont racistes et ceux pour qui il n’y a pas de racisme au Québec.
Or, la réalité est plus complexe, elle exige un minimum de sens critique et beaucoup de nuances. Il y a deux ans, j’ai posé la question dans ma chronique du 6 février 2017 : le Québec est-il raciste ? Et j’y ai répondu aussi.
DES PROGRÈS ET APRÈS ?
Le Québec, à l’instar des sociétés démocratiques, n’est pas raciste, mais il y a ici comme au Canada des éléments et des groupes extrémistes qui propagent la haine.
Mais contrairement à certains pays européens, la classe politique québécoise ne compte aucun parti d’extrême droite qui « souffle sur les braises de l’intolérance ».
Le Québec s’est doté, en 1975, d’une Charte québécoise des droits et libertés et d’une Commission des droits de la personne.
Il adhère aux instruments juridiques internationaux ainsi qu’à la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale.
L’Assemble nationale a adopté à l’unanimité une Déclaration du gouvernement du Québec sur les relations interethniques et interraciales, en 1986.
Toutes ces actions n’ont pas empêché que deux jeunes Noirs soient tombés sous les balles de policiers de Montréal : Anthony Griffin, le 11 novembre 1987, et Marcellus François, le 3 juillet 1991. L’attentat de Québec du 29 janvier 2017 est une autre tragédie qui a marqué le Québec.
ÇA PREND UNE VOLONTÉ POLITIQUE
Il y a bien eu, en 2008, dans la foulée de la crise des accommodements raisonnables, une politique québécoise de lutte contre le racisme et la discrimination qui visait à « favoriser la participation de tous à l’essor du Québec », mais c’est demeuré un feu de paille.
S’il est vrai que l’égalité juridique est acquise au Québec, l’égalité réelle, elle, se fait toujours attendre pour plusieurs. C’est un grand défi qui nécessite une volonté politique claire.
Car il y a beaucoup à faire. À ce jour, le gouvernement du Québec n’a pas atteint les objectifs qu’il s’est lui-même fixés dans son programme d’accès à l’égalité en emploi pour les minorités visibles et ethniques.
Alors que ces minorités représentaient 18 % de la population active, en 2017, elles n’étaient que 10,5 % parmi le personnel de la fonction publique québécoise. Une action s’impose.
Un autre dossier majeur qu’il faut régler est celui de la Commission des droits de la personne et de la Protection de la jeunesse (CDPDJ).
Elle est laissée sans leadership depuis la nomination de sa présidente, Me Tamara Thermitus, le 20 février 2017. Un atterrissage chaotique l’a conduite à un arrêt de travail, en octobre 2017 puis à son remplacement, par intérim, depuis le 15 mars 2018.
Une Commission au coeur de la lutte contre le racisme et la discrimination qui est paralysée par des conflits internes depuis deux ans.
Il est urgent que le gouvernement et l’Assemblée nationale fassent consensus sur une candidature compétente et crédible qui redonnerait aux citoyens la confiance en cette institution.
Autant d’indications que le gouvernement fait de la lutte contre la discrimination l’une de ses priorités.
« LE QUÉBEC, À L’INSTAR DES SOCIÉTÉS DÉMOCRATIQUES, N’EST PAS RACISTE, MAIS IL Y A ICI COMME AU CANADA DES ÉLÉMENTS ET DES GROUPES EXTRÉMISTES QUI PROPAGENT LA HAINE »