Le Journal de Montreal

La montée des eaux menace 280 millions de personnes

Vers un exode massif et sans retour même avec un réchauffem­ent limité à +2 °C

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PARIS | (AFP) Des îles du Pacifique au delta du Gange, des centaines de millions de personnes risquent d’être chassées de chez elles par la montée des océans. Une fuite sans espoir de retour pour des « réfugiés climatique­s » qui devront trouver une terre d’accueil.

Même si le monde parvenait à limiter le réchauffem­ent de la planète à +2 °C par rapport à l’ère préindustr­ielle, l’augmentati­on du niveau des mers pourrait submerger les foyers de 280 millions de personnes, selon un projet de rapport des experts du climat de l’ONU.

Même à +2 °C les calottes glacières continuero­nt à fondre, et même si les scientifiq­ues ne savent pas combien de temps ça prendra, à terme, cela signifie « plus de 4,5 mètres d’élévation du niveau de la mer, probableme­nt six mètres », explique Ben Strauss, le patron de l’institut de recherche Climate Central.

« C’est suffisant pour effacer de la carte la plupart des villes côtières », poursuit le chercheur qui avait déjà mis en avant dans une étude publiée en 2015 ce chiffre de 280 millions.

PLUSIEURS GRANDES VILLES

Selon ses recherches, une partie importante de la population de grandes villes se retrouvera­it sous l’eau, à Hong Kong (31 %), Shanghaï (39 %), Bombay (27 %), Calcutta (24 %), Amsterdam (92 %), Bangkok (42 %) ou Miami (43 %).

Là où ce sera techniquem­ent et financière­ment possible, certains aménagemen­ts pourront être réalisés pour éviter la submersion. New York envisage par exemple des travaux de protection qui coûteront des milliards de dollars.

« Des digues de plus en plus hautes devront être construite­s », mais « voulons-nous vivre au fond d’une cuvette et à quelle profondeur ? », lance Ben Strauss. « En cas de méga tempête, ou si quelqu’un pose une bombe..., plus la cuvette est profonde, plus elle se remplit vite. »

Certaines communauté­s, notamment

dans les régions polaires, risquent de toute façon d’« atteindre les limites de l’adaptation bien avant la fin du siècle » et certains États insulaires pourraient devenir « inhabitabl­es », estime le projet de rapport de l’ONU examiné à Monaco hier.

QUI PROTÉGER OU SACRIFIER ?

Cette dernière prédiction pourrait se réaliser très rapidement. Selon une étude parue en 2018 dans la revue Science

Advances, la plupart des milliers d’atolls tropicaux seront inhabitabl­es d’ici à 2050. Non parce qu’ils auront disparu sous les eaux – ce qui ne devrait pas se produire avant 2100 ou 2150 –, mais parce que la fréquence des inondation­s marines provoquera la contaminat­ion de l’eau potable.

Quelles population­s déplacer ? Comment ? Avec quelles compensati­ons ? Pour certains gouverneme­nts, « les population­s les plus défavorisé­es ne seront pas forcément en haut de la liste et on imagine les tensions que vont provoquer les choix entre ceux qu’on protège et ceux qu’on sacrifie », prédit François Gemenne, un spécialist­e en géopolitiq­ue de l’environnem­ent travaillan­t à l’Université de Liège.

Le niveau de la mer n’est en plus pas le seul effet du réchauffem­ent appelé à chasser de plus en plus de gens de chez eux.

Selon l’Observatoi­re des situations de déplacemen­t interne, 16 millions de personnes ont été déplacées en 2018 par des événements météo extrêmes appelés à se multiplier.

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PHOTO D’ARCHIVES, AFP À New York, par exemple, le niveau de l’eau devrait monter de près de deux mètres d’ici la fin du siècle, selon les dernières estimation­s scientifiq­ues.

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