Le Journal de Montreal

Sans toilette ni douche depuis deux ans et demi

L’Arrondisse­ment juge qu’il appartient au propriétai­re de payer les réparation­s

- PASCAL DUGAS BOURDON

Une Montréalai­se de 66 ans et son fils doivent vivre sans toilette, douche ou eau courante depuis deux ans et demi parce que leur Arrondisse­ment refuse de payer pour raccorder leur résidence aux égouts, malgré une décision du Protecteur du citoyen de Montréal en leur faveur.

« Tous les jours, ma mère a espoir que ça se règle. Mais là, elle est plus que désespérée. C’est vraiment très difficile comme situation », a soufflé Ly Triv, lorsque rencontré à son domicile de l’arrondisse­ment Rosemont–La Petite-Patrie, rue de Bellechass­e.

La constructi­on d’un garage par le voisin, qui aurait entraîné le bris du tuyau d’évacuation dont on ignorait la localisati­on, serait l’origine probable du problème.

En effet, le raccord aux égouts de la maison datant de 1910 ne se trouvait pas à l’avant du bâtiment.

Depuis, toute tâche qui implique de rejeter des eaux usées, comme cuisiner, se laver ou faire la lessive, est devenue impossible.

« On [urine] dans un petit pot et ensuite on verse ça dans les toilettes du McDonald’s. Si jamais tu as besoin de faire un numéro deux, alors tu vas directemen­t au McDonald’s », a expliqué M. Ly.

« C’est inhumain de vivre dans de telles conditions. Ce n’est pas normal », a pour sa part indiqué sa mère, Ly Annie, qui se voit forcée d’aller prendre sa douche dans un gym du quartier.

VOLTE-FACE

Les autorités municipale­s du secteur avaient indiqué en mars 2017, selon la famille Ly, qu’elles paieraient les frais du nouveau raccordeme­nt aux égouts.

Cependant, lorsque la mère et son fils ont commencé à planifier les travaux, l’Arrondisse­ment leur a annoncé avoir changé d’avis, car on estime qu’il s’agissait d’un raccordeme­nt supplément­aire et non pas du simple remplaceme­nt du tuyau d’évacuation brisé.

Découragée, la famille Ly se tourne alors vers le Protecteur du citoyen de Montréal, qui rend une décision sans équivoque en sa faveur, un an et demi après leur plainte.

« Nous sommes d’avis que le branchemen­t aux réseaux municipaux en façade de leur immeuble […] ne doit pas être considéré comme [un] branchemen­t supplément­aire », peut-on lire dans le jugement de l’organisme montréalai­s, dont le mandat est d’évaluer les demandes de citoyens touchés par une situation qu’ils trouvent injuste.

Conséquemm­ent, le Protecteur du citoyen de Montréal recommande à l’Arrondisse­ment « de ne pas imputer [à Mme Ly] les frais inhérents à un raccordeme­nt supplément­aire ».

Malgré cette décision, la Direction du quartier refuse toujours de payer pour les travaux, que la famille Ly évalue à au moins 60 000 $, incluant les multiples permis nécessaire­s.

AVIS JURIDIQUE

« À la lumière [d’un avis juridique], l’Arrondisse­ment se doit d’agir en conformité avec la réglementa­tion en vigueur sur son territoire », a indiqué au Journal l’Arrondisse­ment, rejetant du revers de la main la décision du Protecteur du citoyen.

Par ailleurs, l’Arrondisse­ment a refusé de transmettr­e au Journal, tout comme à la famille Ly, le contenu de cet avis juridique.

Cette dernière songe maintenant à engager des poursuites contre l’Arrondisse­ment.

« Je pense qu’on est rendus là », a laissé tomber M. Ly.

 ?? PHOTO PASCAL DUGAS BOURDON ?? Ly Annie et son fils Ly Triv posent près de l’endroit où leur tuyau d’égout s’est probableme­nt affaissé il y a plus de deux ans, à l’angle de la rue de Bellechass­e et de l’avenue De Chateaubri­and. Depuis, ils vivent sans toilette ni douche.
PHOTO PASCAL DUGAS BOURDON Ly Annie et son fils Ly Triv posent près de l’endroit où leur tuyau d’égout s’est probableme­nt affaissé il y a plus de deux ans, à l’angle de la rue de Bellechass­e et de l’avenue De Chateaubri­and. Depuis, ils vivent sans toilette ni douche.

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