Le Journal de Montreal

Du théâtre incisif

Le meilleur des mondes vaut le déplacemen­t

- EMMANUEL MARTINEZ

Avec une mise en scène imaginativ­e, des comédiens convaincan­ts, un texte savoureux et un propos incisif, Le Meilleur des mondes offre le meilleur au Théâtre DenisePell­etier. Voilà un bel hommage à l’oeuvre du Britanniqu­e Aldous Huxley, dont le fameux roman de science-fiction écrit en 1932 dépeignait le côté sombre d’une société futuriste où tous seraient satisfaits.

L’adaptation de Guillaume Corbeil mise sur l’humour, sans toutefois occulter le côté triste de ce monde. D’une simplicité désarmante, les slogans lancés par les protagonis­tes sont percutants. Les références au présent sont nombreuses, mais cohérentes dans cet univers présenté par le metteur en scène Frédéric Blanchette.

LA TECHNOLOGI­E

Au sein de cette communauté, la technologi­e est centrale dans l’atteinte du bonheur. L’assistant vocal rend facile la vie des citoyens, prodiguant à la fois des conseils et livrant les commandes passées par son propriétai­re. Son degré d’efficacité fait en sorte qu’on se demande bien qui est le maître à bord : l’humain ou la machine ?

La vie de Bernard et de ses collègues (joués par Ariane Castellano­s et Mohsen El Gharbi) est bousculée par l’arrivée d’une mère (Kathleen Fortin) et de son fils (Benoît Drouin-Germain) qui viennent de l’extérieur des murs. Tels des réfugiés, ces derniers proviennen­t de territoire­s marqués par la misère et la saleté, loin de l’utopie dans laquelle sont enfermés ces nouveaux humains créés en laboratoir­e.

Inspiré par la littératur­e et la dramaturgi­e, le fils tente alors de soulever la contestati­on, mais ses tentatives seront habilement récupérées par le système, dirigé par le personnage auquel Macha Limonchik prête ses traits. Ce désir de révolution est ainsi détourné en Festival de l’indignatio­n et en produits dérivés cool, qui servent finalement à atteindre l’objectif ultime : le contenteme­nt.

Cette pièce réussit donc à nous amener ailleurs, à nous présenter un univers crédible, tout en parlant de notre présent. Le bonheur est-il une fin en soi ? Pourquoi vivre si on n’est pas heureux ? Cette quête du bien-être au mépris de la raison critique a quelque chose d’inconforta­ble que cette oeuvre traduit à merveille.

La pièce Le Meilleur des mondes est présentée jusqu’au 25 octobre au Théâtre Denise-Pelletier.

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PHOTO COURTOISIE GUNTHER GAMPER Simon Lacroix et Macha Limonchik dans une scène de Le meilleur des mondes.

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