Le Journal de Montreal

Ça veut dire quoi, « se pardonner » ?

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Je vous lis souvent et j’ai remarqué qu’il vous arrive de dire aux gens qu’ils doivent « se pardonner ». À titre d’exemple, ce matin, à « Une femme désabusée » qui avait découvert deux ans après sa séparation que l’homme marié rencontré sur le net avec qui elle avait entretenu une relation pendant plus de 10 ans sans qu’il ne quitte jamais sa femme comme promis, avait deux autres maîtresses pendant qu’il sortait avec elle, vous dites : « Pourquoi ne pas laisser ce vilain monsieur de côté pour mettre vos énergies à vous pardonner à vous-même de vous être laissé embarquer ? »

Pourquoi devrait-elle se pardonner à elle, alors que c’est lui le salaud ? Vous voudriez qu’elle assume l’entière responsabi­lité de la tricherie pendant que le monsieur continue simplement sa vie avec sa femme après avoir profité d’elle ?

D’ailleurs, ça veut dire quoi, se pardonner ? Ça correspond à quoi, quand on en veut à mort à quelqu’un ? Et d’ailleurs, comment fait-on pour se pardonner ? Qu’estce que ça va nous apporter de plus, quand on a de la peine et qu’on souffre, voulez-vous bien me le dire ? Annie-Belle

Vous oubliez une donnée importante que je vais vous rappeler pour que vous compreniez le sens de ma réponse. Cette personne disait que d’avoir appris deux ans après sa séparation que ce goujat fréquentai­t deux autres femmes pendant qu’il sortait avec elle « … avait ravivé sa douleur (de l’avoir perdu) qui commençait à peine à s’estomper… Comment pardonner à quelqu’un d’avoir monté un tel tissu de mensonges pour garder mon coeur prisonnier ? »

Il faut savoir que pour pardonner aux autres, il faut d’abord apprendre à se pardonner à soi-même. Dans cette affaire, elle a sa part de responsabi­lités. Pour ne pas traîner ce vilain passé comme un boulet, elle doit se pardonner à elle-même de s’être laissé prendre par ce monsieur pour enfin le sortir de sa tête, mais aussi se servir de cette erreur de parcours pour mieux mener le reste de sa vie.

Quand on est conscients de ses fragilités, de ses peurs, de ses échecs, on gagne la capacité de les regarder en face et on augmente nos chances de se doter des moyens de les contrer à l’avenir. On apprend aussi qu’échouer, ne fait pas de nous une mauvaise personne. Ça fait de nous une personne plus aguerrie pour faire face à la vie, et ça nous libère du poids de toutes les pensées négatives nourries envers celui ou celle qui nous avait blessé, pour repartir à neuf.

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